Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

jeudi 30 septembre 2010

Rendez Las Ventas à la corrida

J'ai suivi avec l'intérêt que je lui porte toujours, les derniers commentaires d'Olivier. Pour une première bonne raison liée à mon goût admiratif pour sa belle écriture, mais aussi pour sa perception d'excellent aficionado.

En effet, s'il nous arrivait de nous « friter » sur des sujets littéraires, nous étions en harmonie totale sur le sujet de ce qu'il nomme la « tauromachie » et les « tauromaches ».
Harmonie, semble t'il rompue par mon commentaire sur la corrida dite « triomphale » de Dax.

J'ai toujours été, jusqu'alors dans une arène, avec le regard fixé sur le toro, cherchant à déterminer son comportement, sa bravoure éventuelle, sa caste éventuelle, mesurant aussi sa mansedumbre, sa force, épiant son galop, ses moindres fléchissements, sa conformation, ses pattes, son cou, évidemment sa tête, sa conformité zootechnique, sa corne préférentielle. Ceci demande une forte concentration, mais permet de mieux mesurer comment le matador s'y prend avec lui, et déceler de probables ou éventuelles tricheries.

Va donc pour le toro. Maintenant le matador. Son placement, le pico ou la bamba, sa façon de mettre la jambe, s'il est croisé ou non, sa façon de lidier, de remater les passes, de donner du temps au toro, ses toques, la position de son bras lorsqu'il cite le toro, ( devant, à la hanche), sa façon de l'entraîner, (centrifuge, centripète), et de « l'obliger ». Mais aussi, le travail des subalternes, évidemment le picador, mais pas seulement. Ceci demande aussi une très forte concentration.

Cette façon de regarder la corrida est extrêmement contraignante, et de plus j'ai souvent remarqué que soit je regardais le toro, soit je regardais le torero. Or la corrida, c'est évidemment une synthèse et une harmonie. Seules les grandes faenas, rarissimes, qui font curieusement l'unanimité, emportent l'adhésion du spectateur aficionado ou non, dans une vision beaucoup plus synthétique, c'est à dire que l'émotion, la puissance dégagée, la vibration liée au danger latent du toro et l'exposition du matador, peuvent faire passer certains détails de moindre niveau au second plan. A cet égard, d'ailleurs, le visionnage de ce concentré d'émotion, à postériori, à la télé par exemple, ou sur le PC, est souvent frustrant, car outre qu'il s'agit d'un plat réchauffé, le film accentue tous les défauts éventuels de la gestuelle, ou du placement qui nous avaient échappés. Donc, à l'évidence, les dispositions dans lesquelles on se trouve, râleur à priori critique ou réceptif, l'immédiateté des émotions du direct contribuent énormément à notre perception même et à notre appréciation. Je pense souvent, dans un domaine différent, au cas de Brel, par exemple, et l'incroyable puissance émotionnelle qu'il dégageait sur scène, et cette manière de frustration lorsqu'on l'écoutait sur disque ou CD.

J'étais devenu une machine à critiquer, me gâchais tout plaisir, pour arriver à la conclusion que ce que je voyais dans l'arène n'avait plus rien à voir avec l'idée que je me faisais de la corrida, ou de MA corrida. Donc, je désertai les arènes, regardant toutefois, honteusement, tout ce que je pouvais à la télé ou sur mon ordinateur.

Ceci dit, nous savons tous que la corrida est une quête et qu'à ce titre il faut admettre les échecs, les déceptions, et finalement, croire au miracle. Donc, bien sûr, admettre des spectacles médiocres ou lamentables ou se contenter du fait, tout aussi rare et exceptionnel, que le matador a fait ce qu'il fallait devant l'opposant qui lui était proposé. C'était être « regular » à las Ventas, c'est à dire servir la lidia qui convenait, sans cabotinerie excessive, ni tromperie et surtout avec dignité. Simplement, bien faire ce qu'il y avait à faire, sans plus, sans moins, non plus. Mais aussi, ne rien faire s'il n'y avait rien à faire.

Or la corrida moderne, dans son fonctionnement actuel, et surtout en Espagne, où les spectateurs populaires ont massivement déserté les arènes, s'accompagne d'une « obligation de résultat », ce qui est parfaitement antinomique avec l'esprit même de la corrida. Ce sont quatre ou cinq « figuras » qui contrôlent la taquilla, exigent des toros qui permettent cette fameuse « obligation de résultat », mais en contre partie, et au prix de cachets exorbitants, assurent le remplissage des gradins de curieux de passage, prêt à s'enflammer à priori, donc, assurent également la relative tranquillité, au moins à court terme des organisateurs. Et si le tauromache pouvait se satisfaire et même s'enthousiasmer pour une lidia âpre, de 20 passes, cette dimension a pratiquement disparu, exception faite de certaines plazas dites toristas. Ce spectacle là semble bien définitivement destiné à une poignée d'initiés, par ailleurs peu disposés à payer les places un prix exorbitant, mais ne correspond nullement au goût des nouveaux spectateurs, qui veulent que cela bouge et une centaine de passes.

Et je persiste, toutefois à dire que cette corrida de Dax, si elle ne fut certainement pas la corrida du siècle, ni de l'année probablement, compte tenu des ingrédients, toros, toreros, n'a été ni détestable ni grotesque et que les trois matadors ont fait leur maximum, alors que les toros n'étaient, dans leur catégorie, ni ridicules ni inintéressants pour certains. Le spectacle a rempli ses promesses, conformes à l'affiche, et a rendu les gens heureux. Ceci dit on savait pertinemment ce qu'on allait voir et on pouvait rester chez soi.

Je persiste également à dire, qu'à l'évidence on était dans une autre dimension, et que ce que j'ai vu ne m'est allé ni au cœur ni à la tête. Il y du bon théâtre de boulevard et des choses d'une prétention insupportable, de bon films populaires et de bien pesants navets dans certains cinémas d'art et d'essai, et c'est vrai pour tous les arts, et singulièrement en littérature et aussi en chant, pour ceux que je connais un peu.

Un tout autre problème est de regretter comme moi, les dérives actuelles de la corrida, voire les déplorer, toutefois, sans amnésie excessive.

On sait bien que dans les années 50 on toréait des toros de 3 ans et que le passage obligé au toro de 4 à 5 ans a eu raison de certaines figuras de l'époque. L'afeitado s'est toujours pratiqué. Les mêmes qui parlent, avec des trémolos larmoyants dans la voix, d'Antonete ou de Paula ou de Romero ne les ont souvent jamais vus, encore moins bien, au moins pour les deux derniers ou se foutaient d'eux, toujours les deux derniers, lors de leurs déroutes. Il y avait eu dans le même cas, sans que la liste soit exhaustive, Chicuelo, Cagancho, voire le divin chauve. Les revisteros étaient tout aussi vendus et même certainement beaucoup plus, ou d'une façon moins subtile.

Il vaudrait mieux s'interroger sur quelles étaient les différences, avant de jeter le bébé avec l'eau du bain.

Il fut une époque où, y compris les figuras, toréaient tous les encastes, même si souvent, ils pouvaient faire entendre leurs préférences. Ordonez par exemple se colletait plutôt souvent avec des Miura, même s'il appréciait particulièrement les Atanasio. Je pense qu'il subsistait une notion de verguenza torera.

On pouvait encore distinguer clairement les morphologies des toros, dont les éleveurs recherchaient encore la bravoure et la caste. Les faenas étaient en général courtes et respectaient les trois tiers. On sait ce que dans la corrida moderne il en et advenu, en exigeant un toro noble, suave, capable d'encaisser 80 passes sans barguigner.

Mais surtout, me semble t'il, las Ventas en premier lieu, puis dans un registre traditionnellement plus « gitan » ou artiste, Séville, étaient des passages obligés pour tous le matadors.

Un matador devenait, au yeux des aficionados, réellement matador, lorsqu'il était passé par las Ventas et ses exigences, jugées souvent démesurées. C'était une manière de Doctorat, et être bien à las Ventas garantissait les engagements futurs. A l'évidence, avec la vulgarisation liée à la télévision, ce rôle s'est émoussé, et nous n'allons pas ici analyser les fautes des uns et des autres. Toutefois, il restait à las Ventas, un public plutôt compétent, très exigeant, qui en fait était détenteur de la loi et de la règle. On sait le rôle qu'on joués aussi bien le terrible tendido 7 de ce temps, je dis bien, et des revisteros tels que Vidal ou Navalon, dans la tentative de maintien de cette orthodoxie, aujourd'hui rangée dans de poussiéreux placards.

Tout torero savait que ses exigences et ses contrats de l'année allaient se finaliser après un passage réussi à las Ventas. Passage réussi ne signifiant pas forcément triomphe devant les animaux qu'on allait lui proposer, mais respect strict de la « lidia », et pertinence de sa prestation, en fonction, encore une fois du toro. Et il fallait renouveler chaque année l'opération.

Ce public, dans sa majorité savait parfaitement « voir » si un toro avait des passes, dans ce cas, il n'était pas pardonné de ne pas les donner, s'il n'en avait pas, dans ce cas, ce public admettait fort bien une lidia de « castigo » ou de mise en place efficace et rapide pour l'estocade. Mais jamais il ne tolérait les placements que l'on voit aujourd'hui, devant les toros d'aujourd'hui, l'abus de « pico », je dis bien l'abus, encore moins qu'on le prenne à témoin pour lui faire comprendre que le toro n'avait pas de passe alors qu'il était simplement un peu compliqué. Bref le matador devait être « regular », au minimum, ce qui pourrait se traduire par honnête. Il n'admettait pas non plus, ce public, qu'on allonge inutilement les « faenas » avec des passes inutiles elles mêmes.

Cette intransigeance génait beaucoup de monde alors que Canal proposait des ponts d'or pour diffiser des corridas, puis toutes les tvs nationales ou annexes.

Donc le lobby PPien falangisto-fascistoide des éleveurs a agi. Quelques allumés dont le Dede, ont expliqué qu'il y avait des ayatollahs, des irresponsables qui n'avaient rien compris à toute la difficulté de l'affaire, et qu'il fallait laisser faire ceux qui savent, dont lui, qui fut si brillant à Madrid.

Dont acte!

À suivre, peut être
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lundi 27 septembre 2010

Collection de cartes postales de Majunga

J'ai repris quelques phrases d'un texte que Ludo avait hébergé, en les illustrant. Ca fait très carte postale, j'en suis conscient.





On y voit aussi, sur une centaine de kilomètres une multitude de gens qui lavent la terre rouge pour en extraire de l'or. Tous, enfants y compris, se déplacent avec leur plateau de métal sur la tête, ça fait chapeau aussi. Alors ils creusent un peu partout, puis portent la terre à la rivière la plus proche. Les plus nantis ont des brouettes, les autres portent des sacs pleins d'espoir rouge.






A Majunga, le rues sont larges, la ville est plutôt bien organisée, normal c'était la ville de Tsiranana, le premier Président après le départ des français.














Il y a un beau lycée aussi, une jolie promenade en bord de mer










où les gens viennent manger des brochettes de zébu. Je te dis de suite, que ce truc c'est pas pour les estomacs de Vazahas.
Nota: vue d'un étal de boucher! Odeur en moins. Mamy, notre ami, malgache, guide préciserait qu'on "lave" la viande!



















Nous avions un bungalow physiquement sur la plage à l'hotel.













c'est à dire qu'au lever, je pouvais me trainer jusqu'à un abri équipé de deux fauteuils de plage et assister au spectacle du jour qui naît.













Parmi les roses, les mauves doux, les bleus tendres, le murmure du Mozambique le soleil pare d'or la cime des grands « filaos » de la plage et s’effiloche en gerbes tendres aux pointes des cocotiers. Moment magique, amigo.







Je peux te dire aussi, que du même endroit, j'ai admiré les couchers de soleil qui commencent par une symphonie de bleus, de mauve, de rose,









pour s'achever en apothéose sanglante dans la mer. Je pensais bien sûr à un dos de toro. Indescriptible et stupéfiant.

dimanche 19 septembre 2010

Une fin d'après midi odinaire

Mathilde a cours aujourd'hui jusqu'à 17h. Ensuite, elle va à un entrainement d'athlétisme. Une cousine plus âgée, qu'elle admire, fait de l'athlétisme et de la guitare. Alors Mathilde a décidé de faire de l'athlétisme le Vendredi et du solfège le Jeudi. Je suis content qu'elle se détourne de la télé et de l'Internet.
Je suis garé devant la boucherie à bonne distance de la sortie du Collège. Elle ne veut pas que je l'y attende, car dit t'elle, je suis grande maintenant. Déjà en 6ème elle ne voulait pas, alors, pensez maintenant en 5ème. Je m'imaginais qu'elle était gênée d'avoir un papa blet, mais semble t'il, c'est une tendance générale. Et c'est un parent d'élève d'age normal qui me l'a dit. Alors j'écoute les grosses têtes en attendant, c'est gras mais ça me fait marrer, parfois.
Mathilde prend son temps généralement. Les copains, les copines, les histoires de Collège. Elle nous raconte tout dans le détail et jusqu'à satiété. Je trouve ça plutôt bien. Bientôt, elle ne parlera plus. Au moins de ces choses.
P. sort de la boucherie. Je suis toujours heureux de le voir. C'est un spécialiste de la Palestine et de l'eau dans les pays méditerranéens. Il partage son temps entre sa famille à Dax, le Quai d'Orsay, diverses universités où il donne des cours, et des colloques partout autour de la méditerranée. Il est chaleureux avec cette simplicité confondante qu'ont, je l'ai souvent remarqué, les vraies pointures. Il est inquiet car son garçon de 10 ans a un problème à une hanche. Je n'ai pas retenu le nom de la maladie. Il me dit combien c'est étonnant de voir la faculté d'adaptation des enfants. Son gamin devra marcher avec des béquilles pendant un an. Parce que je lui en ai demandé des nouvelles, il me dit que sa femme a moins de temps, car maintenant elle est chef de service. « Jefe » il dit, alors, je dis. « Jefe!Jefe! Jefe!, comme Gil Robles» oui il me répond, et nous rions. Il revient de Crête. Il a eu une journée libre là alors, il a loué une voiture. Ça te plairait m'a t'il dit, la montagne qui tombe dans la mer. C'est un passionné d'Espagne il passe ses vacances en famille soit dans les trous au cœur des Monegros ou dans le haut des « embalses » de Jaca, ou des villages perdus d'Andalousie, enfouis dans la pierraille. Sa femme est une brune pétillante, avec des cheveux aussi abondants et drus que les siens sont, maintenant décimés par une calvitie un peu précoce, rares et blonds. Nous fréquentons elle moi, depuis que Mathilde est en age scolaire, la même Association de Parents d'élèves, pas la gouvernementale, l'autre, les mêmes conseils de classe ou d'écoles primaires. Elle a un beau regard qui rit, comme lui.
Mathilde est arrivée et s'est installée dans la voiture dont elle a allumé la radio, trop fort. Il me remercie pour le livre de Malefakis que je lui ai dégoté en Espagne sur la réforme agraire, car je ne voulais pas me séparer du mien. Il l'a lu et le juge sensationnel. Il va l'utiliser pour sa prochaine publication. Il me dit qu'en effet, cela module la seule appréciation ou la caricature des « latifundistas » en Espagne et que le problème était bien plus général. En regardant la carte de l'Espagne juste après la rébellion des militaires, on constate bien que ce sont les terres y compris de petite agriculture, de petits propriétaires pas spécialement aisés et ultra catholiques qui ont constitué le gros des supports franquistes. La propagande disait que la république allait voler leurs terres, ce qui était faux, tout en massacrant les curés, ce qui hélas fut assez vrai juste après le 18 juillet 1936. C'est toujours ainsi, me dit t'il lorsqu'on travaille un sujet, la complexité apparaît. Mathilde qui s'impatiente, monte la radio. Il me demande si je travaille toujours sur la Guerre d'Espagne, je lui dis que oui. Viens me voir, un jour, me dit t'il. Je dois y aller là!
Mathilde était de mauvais poil. Tu peux me dire que je tarde trop! Je lui dis de ne pas me parler ainsi. Tu parles toujours de la Guerre d'Espagne. Je fais ce que je veux ai je répondu sottement. Ben oui, a t'elle dit énigmatique. La demoiselle a mangé une pomme et une banane, ça change des gâteaux au chocolat. Elle s'est changée, et a dit: ces chaussures c'est fait pour frimer. Sa mère lui avait choisi de jolies chaussures de sport. On lui en avait fait la remarque. Tu aurais pu nous avertir plus tôt ai je dit. Bon on y va a t'elle dit.
Nous sommes toutefois arrivés en avance au stade. Je considérerais encore comme une honte d'être en retard. La jubilation d'une ponctualité exemplaire gomme chez moi le stress préalable. Tu me laisses. Je suis habitué. Elle a vu une « connaissance », tu vois je vais rester avec elle. Mouais, j'ai attendu que l'encadrement arrive.
L'hôpital surplombe quasiment le stade, si on regarde bien. Et j'ai bien regardé, peut être pour la première fois. Ocre et massif.
J'ai laissé Mathilde aux joies de la préparation à la compétition athlétique et mis le cap sur le vaisseau ocre.
Maman a été opérée Mercredi. J'étais là avec mon frère lorsqu'elle s'est réveillée. Je suis à la retraite? A t'elle demandé. Puis mon patron est mort? Puis nous regardant d'un regard il faut bien le dire un peu vide, vous êtes grands. Puis elle revenue au royaume des futurs morts vivants. Je lui ai dit, tu avais la tête en vrac. Qu'est ce que j'ai dit. Nous avons raconté. Elle s'est murée dans un silence outré.
Le lendemain, jeudi donc, le matin elle allait bien. Je lui ai amené deux Carver. Les vitamines et Tais toi, je t'en prie. En fin d'après midi, elle était fatiguée.
Je suis passé la voir ce matin. Tu te rends compte m'a t'elle dit, l'esthéticienne est venue. Je n'y suis jamais allée. C'est agréable. Elle était habillée, pimpante comme toujours.
Du stade à la chambre, 10 minutes. Tu es venu me dit t'elle. Oui tu vois, Mathilde est au stade. Je ne veux pas te déranger, Merde, tu ne me déranges pas Maman! Soi poli!
Tu as pu lire Carver? Oui, j'aime beaucoup me dit t'elle. C'est étrange ces phrases si courtes, ces il a dit, elle a dit. Oui j'ai répondu c'est spécial j'adore. Il écrit sur rien.
Maman est une lectrice acharnée. Elle a 88 ans. Et puis dit t'elle, on sent autre chose, derrière ces mots si simples. Des gens au bord de la rupture ou de la folie. Oui Maman, c'est pour cela que je l'aime.
Je partais, elle m'a demandé, ton ami Olivier il a écrit son troisième tome? Je crois oui, j'ai dit, il devrait sortir d'ici la fin de l'année. Je le lirai dit t'elle.
Quand je suis passé chercher Mathilde au stade, j'étais évidemment en avance. Des juniors s'entrainaient à la touche. Hop! Hop! Hop! faisaient t'ils en bougeant dans l'alignement pour tromper le contre. De mon temps c'était bien plus simple. Les codes sont très savants maintenant. Il y avait une odeur d'herbe coupée, d'embrocation et de jeunesse qui me fit frissonner.
Voyant enfin Mathilde revenir, je pensai à cet ami de Paris, qui lorsque je lui avais annoncé que j'allais adopter une petite fille, m'avait plaisamment dit: tu vas faire une orpheline.
Pourtant, si on vit suffisamment longtemps, on finit toujours par être orphelin.

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mardi 14 septembre 2010

A Olivier et Pierre

J'avais déjà reçu un mail vengeur d'Olivier, s'inquiétant de mon intégrité entre autre mentale. J'avais moi même ouvert en parlant d'un coup de pied de barrique dont on me taxerait.

Il me semble de plus que dans mon texte je ne parle ni de l'avalanche de trophées, dont je me serais passé, ni d'une quelconque tension dans le callejon. J'ai même parlé d'une autre dimension, et que cela ne m'allait ni au cœur ni à la tête. J'ai surtout parlé des papotages plutôt joyeux de callejon.

Ceci dit, si on excepte ces points, j'en conviens essentiels, on savait aussi ce qu'on allait voir, et je prétends que dans le champ de la corrida « commerciale », on a vu ce qui se fait de mieux, malgré tout. Des toros de jolie présentation, certains bravitos, et un ou deux avec une pointe de caste. Face à eux, des professionnels qui se sont un peu tiré la bourre, dans le registre de cette corrida.

Alors j'ai dit Adios Chulo car à force d'exigence, je devenais un pisse vinaigre, un isolé sur son Olympe, et me privais même du plaisir des amis, du pellizco en pénétrant dans les arènes, des verres et des rires d'avant et d'après.

Reste que le « vulgum pecus » pour certains a éprouvé du plaisir voire de la joie ou du bonheur, et quel que soit ce qu'au fond on en pense, au niveau de la dangerosité du processus vis à vis de notre corrida, ce bonheur existe peut être aussi.

Bien sûr le problème est de faire durer inutilement les faenas, et ceci impacte directement la façon de toréer. Le fameux toreo moderne qui oblige peu le toro pour en tirer des passes inutiles. Bien sûr on est dans le domaine de la légèreté, mais quand c'est bien fait, après tout pourquoi pas.

Pour décrire l'intensité dramatique j'ai parlé de tentadero. Je ne sais pas si on peut être plus clair.
Pour le prix des places, je pense qu'on et dans le strict domaine des lois du marché, dont par ailleurs, on sait ce que je pense.


Et je suis tellement naïf que je me demande pourquoi les organisations indépendantes de corridas, en dehors des grosses écuries fricassières, ne peuvent pas se mettre d'accord, alors que surtout en France, elles sont en position de force, pour imposer à ces messieurs d'autres règles du jeu, aussi bien au niveau tarifaire qu'au niveau du choix des toros. Bref revoir le fonctionnement même de la corrida.

Accompagnant cela d'une vigoureuse campagne d'explication, ayant pour base la transparence des transactions financières, ne pourrait t'on pas penser à de possibles évolutions positives, qui éviteraient soit d'avoir des toros dits durs mais sans toreros soit des toros dits bonbons avec les figuras ou figuritas.

Ce qui me paraît en tous cas clair, c'est que la caste existe partout, mais que c'est le processus de sélection qui la masque au profit de la suavité, pour employer un euphémisme. Est ce irréversible? On peut le penser, hélas, tant les caractéristiques zootechniques ont été rabotées, et les comportements sont uniformes.

Qu' Olivier se rassure, je ne suis pas dupe de ce que j'ai vu, mais indéniablement, il y a aussi une dimension festive qui existe, sans trop se prendre la tête. C'est ce que j'avais voulu rendre, mais tout le monde n'est pas écrivain.

Il me semble aussi que prétendre que par exemple Juli ne pourrait pas prendre d'autres toros me paraît très exagéré, de même que le toreo de Morante, lui, exige d'autres toros. Mais les deux s'en tiennent à ces toros, plus confortables et qui pourraient garantir des temporadas et des carrières plus longues et plus « profitables » pour tout le monde.

Alors, je suis un peu fatigué de m'auto flageller, de me priver du plaisir de l'arène et de prendre tous les autres pour des ignares et des cons.

La saison prochaine, je crois bien que je vais reprendre le chemin des arènes, en commençant par les novilladas puis un peu Madrid pour me refaire le palais, bien qu'actuellement Madrid!.

Je saurai aussi ce que je vais voir.

Il en est de la corrida comme des vins, des légers, fruités et courts en bouche, d'autres qui râpent et enduisent le gosier, d'autres qui vous parlent. Il en est de la corrida comme de la littérature, de la légère, et de celle qui vous envahit. Dans tous les cas, il y a du bon et du mauvais, du bon léger et du mauvais lourd. C'est ainsi.

Dans tous les cas, il peut aussi y avoir du bon, quels que soient nos goûts personnels.

Si Olivier est sincère, il sait fort bien que je suis infiniment plus proche de Vidal que de Zocato. Ceci dit, il fut un temps où Madrid était un incubateur ou un laboratoire taurin, un passage obligé de tous les risques. Le fameux 7, l'âme maintenant damnée des Ventas, n'est pas non plus exempt de reproches, qui a imposé un toro trop lourd et a détruit les petits encastes. Bien sûr ce rôle gênait les corridas maker et la tele a détruit ce rôle d'influence essentiel, au profit d'un essaimage d'affairistes de tous crins. Vidal avait la nostalgie de ce rôle incubateur et jacobin, mais aussi de juge et d'arbitre par ailleurs si nécessaire. Mais c'était un excellent écrivain, capable aussi de la plus saine mauvaise foi. J'adore ça!

Et les quelques figuras qui orchestrent nos corridas devraient aussi comprendre qu'il serait de leur intérêt de figurer face à certains encastes maudits et accepter cette caste si nécessaire à la crédibilité de la corrida.

Je ne pense pas que l'art se décrète non plus: la littérature est un art sauf que nombre d'écrivains sont loin d'être des artistes, idem pour la peinture, le chant etc.

L'art ne peut naître à la corrida que face à ce danger sourd qu'amène la race et la caste, cette confrontation de plus improbable avec un torero capable d'être élu par le duende et ne raisonne pas uniquement en termes de petite entreprise et de compte d'exploitation. Ça s'appelle l'aficion non et le talent? Dans la majorité des cas, c'est donc bien un spectacle et de plus, festif. On peut le déplorer, c'est ainsi. Ceci fait beaucoup de conditions donc pour qu'apparaisse l'art. Et les mêmes qui encensent Paula et Curro étaient peut être les premiers à les mépriser ou à se foutre d'eux.

A cette corrida, je n'ai pas vu d'art, j'ai plutôt vu une exhibition de ce qu'il faut bien nommer des virtuoses. Et beaucoup de gaité voire de bonheur. Après tout, encore une fois, pourquoi pas.

Ce n'est pas ma corrida. Simplement, j'ai envie d'aimer à nouveau le rire, les déconnades et prendre un peu de recul sur des choses, finalement sans importance.

Et puis le son est diffusé, chacun l'entend à sa façon. Voilà c'est ainsi.

Ma corrida est morte et je crois que je ne la retrouverai qu'à l'issue d'un hasard, d'un geste, d'une respiration, d'un détail. Mais l'art qui ne se décrète jamais n'est que détails.

J'attendrai donc qu'un novillero ait la lenteur de Curro Vasquez, d'Ordonez,du grand Curro et du Paula ou du Morante tourmenté pour me dire que j'ai une raison d'espérer. Sinon, on dira que le temple qui s'arrête au profit d'une horloge fricassière n'est qu'un effet de poignets ou une illusion.

lundi 13 septembre 2010

Pour Ludo, Olivier, Marc et Bernard "largo campo"

My dear Ludo, cher Olivier, cher Marc, cher Bernard;




j'imagine par avance votre sourire et que vous allez vous dire que le Chulo, il a pris un coup de pied de barrique. Vous savez que j'use sans en abuser du privilège de me voir chaque année proposée une place de callejon, privilège lié à la proximité familiale d'un membre influent de la municipalité, déjà anciennement nouvelle, de Dax. Il m'en avait averti quelques jours auparavant, et je redoutais qu'il me propose celle de Ponce et Castella car j'aurais dû inventer quelques prétextes peu vraisemblables pour décliner la généreuse proposition. Il eut donc le bon goût de me proposer celle de Morante, Juli et le Cid. Il faut vous dire aussi que j'accepte toujours cette invitation avec pas mal de gêne, mais je me fais violence.



Donc voilà. Avant la corrida, j'ai retrouvé Xavier, l'imprécateur. On a bu une mousse et il m'a présenté « el batacazo », qui a eu des mots plus que bienveillants pour « el Chulo », mots qui me sont allés droit au cœur. Seul point noir, il me vouvoyait, ce qui me ramenait sans ménagement à mon âge avancé.



Au callejon j'étais à coté d'un type charmant, impresario espagnol, probablement très connu, issu d'une grande famille taurine. Il avait cette courtoisie classieuse que savent avoir les espagnols bien nés. Marie Sara est venue le saluer, ils ont discuté un peu, je n'ai pas osé écouter. Le business je pense. Elle est à l'age où les femmes sont splendides, et elle est tout spécialement splendide.



Ensuite, l'éleveur et les banderilleros sont passés à tour de rôle. Ils étaient tous émerveillés par cette plaza, « caliente » et pleine jusqu'aux nuages, et disaient que les matadors étaient également impressionnés. Victoriano del Rio était au début une petite sphère inquiète. « Mucha ilusion » a t'il dit à mon voisin.



Dans le patio, j'ai même pu échanger deux ou trois mots avec Curro Vasquez. Vous imaginez ça? Il a fait semblant de me reconnaître, car j'étais à coté de la personne influente que j'avais embrassée. Ils font tous et toujours ça. En tous cas j'étais sur un nuage. Je l'ai trouvé petit, mais sa tête ne change pas et je me suis souvenu de ce novillero béni des dieux, horriblement châtié lors de son alternative, qui dut par la suite lutter contre son corps qui se souvenait pour parfois, rappeler l'extra terrestre qu'il avait été.



Dans le couloir j'ai trouvé Morante plutôt sombre. J'étais tenté d'y voir un mauvais présage pour la suite. Je lui ai dit connement « suerte maestro », il m'a dit « merci » comme ils le font tous.



Donc j'ai rejoint ma place avec mon paquet de cacahuètes.



Le premier toro était un mulet décasté, qui n'avait pas une passe et ne voulut rien savoir des bonnes dispositions de Morante. Commentaire d'un de la barrera au dessus de moi, « c'est un voyou, il n'a rien voulu faire, c'est comme ça les gitans, des fainéants! ». Il nous inonda tout du long de commentaires très sonores et définitifs, ponctués de gloussements également sonores de sa dame, dont nous nous serions bien passés. Estocade propre, des sifflets stupides. Victoriano était une boule livide.



Je ne vous raconte pas la suite, vous avez certainement lu les commentaires. Les toros étaient bien faits, dans le type, souvent intéressants de comportement. Juli est au sommet de son art cette saison. Il sait tout des toros et les hypnotise. Pas la moindre faute de placement, il sait donner du temps au toro et lui servir exactement ce qui lui convient. Il a été torerazo, même si, sa puissance, sa facilité, son infaillibilité donnent à son toreo un aspect quelque peu mécanique, qui, je l'avoue, ne me va pas au cœur ou à la tête. Toutefois il a une joie de toréer incroyable, mais il tue comme un cochon. Victoriano est venu embrasser mon voisin.



Un banderillo est venu me piquer sa première cigarette. Jode il a dit, que torero! Son premier toro était un carreton, sans grande transmission ni caste, mais le petit géant a été parfait de bout en bout. Son second était bien plus intéressant et il l'a littéralement envoûté. On se serait cru en tentadero. Inimaginable. Il l'a massacré à l'épée avec entre autres une épée « traversante » qu'il eut l'habileté de faire oublier par une mete y saca. Ceci aurait pu le priver d'oreille mais la pétition était plus que majoritaire.



Victoriano est venu, maintenant, boule rouge de bonheur, commenter à mon voisin combien Juli était un type intelligent d'avoir renvoyé son second toro à la pique pour montrer qu'il était brave. J'adore ces détails. C'est vrai que Juli sait grandir ses toros. U n banderillero m'a piqué une cigarette, mon voisin aussi, un autre des cacahuètes, il devait avoir fini sa journée. En contrepartie, il m'a proposé de l'eau. J'ai des principes, j'ai décliné.



Cid a touché son premier, le meilleur. Il n'a pas vraiment pu montrer sa main gauche, mais il a toréé en souriant, posé, dominateur. Il a très bien tué. El Boni s'est fait poursuivre et a posé une banderille merdeuse. Boni a triomphé « de matador » en 1980 je crois à las Ventas. Ses yeux rient et il a une belle gueule de mec. Il est venu et a demandé: comment as tu trouvé ma pose de banderilles? Mon voisin a dit: « un rejon ». Moi : un « medio violin », Il s'est marré. Je lui ai dit: la prochaine fois, tire les, avec un fusil. « Anda Fandi! » a dit mon voisin. El Boni a une gueule incroyable, des yeux qui rient. Mon voisin l'avait félicité pour son costume, gris perle et vert. Il a dit j'en ai fait faire un autre marron. Les toreros, lorsqu'ils en ont les moyens se disent dans leurs costumes. C'était bien de revoir el Cid avec le sourire et plutôt inspiré. Moi, je craignais d'être en panne de cigarettes. La boule Victoriano s'épanouissait, dans maintenant une paisible modestie. J'ai dit à Boni, il est gaucher Cid? Il m'a répondu, sans vouloir aller plus loin, « gaucher et autres choses ». L'air était doux comme un baiser. A son second, et j'étais dans l'axe exact, Cid a donné une estocade monumentale qui valait largement l 'oreille.



Quand le second de Morante est sorti, le Boni était là, près de nous. Un colorado bien fait rapide qui est allé se fracasser la corne sur un burladero. La voix de l'aficion, au dessus de moi a dit « le salaud il l'a fait exprès ». « Quel salaud a dit la dame ». Victoriano est venu voir mon voisin, et a dit que « c'était probablement le plus brave ». Il n'y avait eu aucune volonté de lui faire taper les planches, simplement, le toro voulait en découdre.



Le sobrero était « un tio ». « Ouff » a fait le Boni. La voix de l'aficion, « il va pas vouloir le voir », « c'est pas un toro pour lui ». Et Morante a commencé son festival de lidiador. Boni a dit. « il se le colle trop », car ici, on était dans une autre dimension. Que vous dire? Une estocade comme un trait de lumière. Deux oreilles pour lui dire aussi que ce toro, il l'avait honoré et que les autres n'allaient pas partir sans lui, à hombros, alors qu'il avait fait le plus compliqué.. Torerazo!



Il régnait une atmosphère de joie, de bonheur. Mais, mes amis, je voudrais ajouter combien tout fut parfait, une brega de luxe, sans un coup de cape superflu, un ordre absolu en piste, un calme et une efficacité incroyables.



Je suis reparti sans cacahuètes, ni cigarettes, avec aussi le beau souvenir de la gueule de Boni et son rire.

samedi 11 septembre 2010

Le Deck is back!

Le Deck is back!




Le voilà donc revigoré par ces vapeurs d'Espagne, et de retour de cette terre qui respire de l'intérieur et du profond.



Car ici, ce qui a survécu à Franco est le minéral, le doudou de la mer, la brise aussi, et ces villes dévastées qui se vengent.



Mais restent l'air, la lumière, la mélopée de la mer sur la plage, une douce mélancolie et enfin, l'espérance de vivre.



Voyageant où l'Espagne existe, il nous a livré quelques joyaux, de tolérance, de retenue et d'amour, mais oui, nous renvoyant à notre folie de na pas profiter de l'instant.



A ceux qui le connaissent, il fait comprendre combien l'écriture est travail, mais qu'en même temps il ne faut pas tuer l'élan vital du premier jet.



Et aussi, qu'être artiste est un risque et un choix de vie.



A ne manquer sous aucun prétexte, http://carnet-taurin.over-blog.com/, y compris madame Jo!



Ole Amigo!

lundi 6 septembre 2010

brindis a Xavier

Mon cher Xavier,




je suis toujours avec un amical intérêt tes joutes avec le psychanalyste de service et maintenant d'autres hurluberlus. Quelque soit le respect que j'ai pour le premier nommé, tu le sais je refuse de briser toute lance avec lui.



Qu'on ait quelque jouissance aller chercher sur son terrain des mots un adversaire professionnellement et redoutablement manipulateur, objet à la fois de crainte de rejet et de vénération, me paraît tout à fait défendable, tant le lien que noue un psychanalyste avec son sujet me paraît « incontournable » comme on dit maintenant.



Ceci dit, lorsque les positions sont totalement antagonistes et que chacun se mêle d'un prosélytisme à peine voilé, on dérive, me semble t'il vers des terres improbables, et la pensée nécessite un sol solide.



Que ne se lasse pas de dire ton rhétoricien favori?, C'est totalement insupportable, y compris moralement, de payer pour voir un taureau se faire torturer en piste. Fort bien! Pourquoi pas. Et dans un monde où, effectivement, tout le monde t'impose des dictats moraux, sociaux ou que sais je encore, alors que la société crève de mal être, il faut toujours trouver un bouc émissaire.



Ceci dit s'agissant de compassion, donc, j'en ai beaucoup plus pour les malheureux qu'on licencie, les analphabètes dans leurs ghettos, et réciproquement, une vraie aversion pour cette société de fausses valeurs.



C'est son seul argument, qui il est vrai peut ébranler certains aficionados. Car en fait, ceux que je connais ne vont pas aux arènes pour voir un taureau souffrir, encore moins voir un type se faire étriper. Ils veulent, même si cela peut apparaître comme barbare, que le toro défende sa vie, (bravoure), chèrement, (caste), et que l'homme mette sa vie en balance avec la sienne. Tout le problème est là. Je sais bien qu'il y a longtemps que les trapézistes de haut vol font leur numéros attachés et avec filet, mais l'intensité n'est pas exactement la même, ni le mérite.



Ils disent aussi, ces aficionados, que les pires ennemis de la corrida sont les taurins eux mêmes lorsque conformément aux exigences d'une société de fric, à laquelle les psy de tous bords apportent leur concours éclairé et apaisant dans les plans sociaux, ils sacrifient tout au profit immédiat, Sacrifient étant bien le mot, car d'une certaine façon ils tuent chaque jour la corrida, en la trayant ou la saignant.



Je ne sais pas si on est dans le domaine du rite barbare, du sacré ou du païen, je sais, certainement qu'on est dans de l'humain, et qu'il convient de revenir, comme au rugby à des fondamentaux. Qu'on aime ou déteste me paraît parfaitement normal, admissible et salutaire. Il est bien des choses que je déteste par ailleurs. Encore faudrait t'il, et c'est d'ailleurs aussi vrai pour les « aficionadeaux  ébahis» et pour les « zantis » qu'on sache exactement ce qu'on aime ou on déteste. Et là malheureusement on en est loin, dans l'un comme dans l'autre des cas.



Reste que la seule prétention d'interdire, au seul prétexte d'un modèle moral, lorsque qu'on ne met personne en danger que soi même, si tel était le cas, me paraît, pour le coup totalement inadmissible. Et ce n'est pas une réaction de 68ard attardé, (forcément) qui n'aurait pas su prendre le virage de la pensée unique et de la mondialisation. C'est une réaction dont la seule prétention est le droit à sa liberté, dans le respect de l'autre.

PS: je veux aussi dire à ceux qui me témoignent sympathie et intérêt dans ma tentative aussi bien en France qu'en Espagne que j'essaierai de ne pas les décevoir.

jeudi 2 septembre 2010

gymnastique revolutionnaire

Dans les années 30, et plus singulièrement après l’avènement de la seconde République espagnole, les anarchistes avaient maintenu une stratégie de « gymnastique révolutionnaire », qui se traduisit non seulement par des destructions de symboles religieux, mais aussi par des « mini émeutes », dont celles d’Arnedo, de Castilloblanco, de Llobregat et surtout de Casas Viejas.




L’église, tout au moins sa hiérarchie, avait au préalable clamé son attachement à la monarchie et son dégoût pour cette démocratie naissante. L’armée tenta un soulèvement totalement raté en 1932, sur le modèle des pronunciamientos fréquents du XIX ème siècle, sous l’égide de Sanjurjo qui devait par la suite être un participant important au soulèvement de Juillet 36 qui devait ouvrir la voie à une boucherie de 3 ans.



Cette gymnastique révolutionnaire avait miné la seconde république, provoqué, en grande partie, la perte des élections en 1933 au profit de la réaction, secouée elle-même par la révolte ouvrière des Asturies en 1934 qui donna lieu à des réactions prémonitoires de ce qu’allait être la guerre. La répression organisée par Franco avec ses troupes marocaines fut sanglante, ce qui radicalisa les positions antagonistes.Il fallut qu’en 36, la gauche espagnole présente un front populaire, dont l’union n’était hélas que de façade pour revenir au pouvoir et sombrer une nouvelle fois face aux exigences sociales et à l’insurrection militaire des 17/18 Juillet 1936.



Pourtant ces trois élections loyales, c’est à dire que tout le monde les jugea y compris à postériori sincères, ont toutes été perdues par ceux qui les avaient organisées, ce qui aurait pu constituer un signe plutôt satisfaisant de bon fonctionnement de la démocratie, et peut être d’un désir profond de l’électorat d’une voie médiane. Et, bien que les majorités, en décompte de voix droite gauche étaient étroites, la loi électorale amplifiait le phénomène au niveau des Cortes, en favorisant les grands regroupements et générant des majorités permettant de gouverner. Peut-on penser que l’issue aurait été différente si la gauche avait su maintenir une vraie union, on peut le penser, quoique les ressentiments des conservateurs, par rapport aux réformistes de tous crins étaient pour le moins violents. Ceci reste toutefois du domaine des spéculations.



Cette gymnastique révolutionnaire répondait, c’est vrai à une vraie détresse sociale, mais fut exercée dans un contexte revendicatif violent, mais aussi d’analphabétisme et d’absence de culture démocratique. Il est vrai que la seconde République avait fait naître des espoirs démesurés, et voulait répondre immédiatement aux nécessités d’une république et d’une démocratie : séparation de l’église et de l’état, réforme de l’armée, acceptation des revendications autonomistes, institution d’une école publique, sans parler du droit de vote pour les femmes, et enfin la très redoutable réforme agraire.



Les nouveaux dirigeants manquaient d’expérience, et souvent, on dut concilier espérances immédiates et potentialités réelles. Primo de Rivera et ses grands travaux avait modifié le panorama de l’Espagne, créé une émigration importante vers les grandes cités, (Madrid, Barcelone, et Bilbao),, et endetté gravement le pays. Bref, avec la crise de 29, et avec un certain retard, l’Espagne se trouva confrontée à un problème majeur de ressources qui compromit la réforme agraire, et les autres.



Bref , ne restait plus, face à l’inexpérience de ces nouveaux politiques qu’une demande du peuple.

Alors, pourquoi tout ce préambule chiant, je m’en excuse.



Il faut se méfier de la gymnastique révolutionnaire, mais en même temps analyser ce qui peut la rendre possible. Analphabétisme, porosité à des idées que l’on ne mesure pas, rejet social, refus de regarder les réalités.



Face à cela, un Etat qui pourrait bien renoncer à ses fonctions régaliennes : éducation des citoyens, ou de citoyens, aide aux plus démunis, construction d’un Etat plus tolérant.



Ce matin, alors que je fraudais et allais chercher mes cigarettes en Espagne, madame Parisot, outrée qu’on veuille augmenter la Csg. Elle gouverne à l’Elysée, on le sait, et elle fait savoir, mais cette réaction immédiate, comme un rappel à l’ordre, nous dit qu’elle va être « obligée » encore de détruire des emplois.

La vieille menace de la délocalisation, de recherche du profit immédiat, sans penser un seul instant à construire ou reconstruire. Le résultat la France est désindustrialisée, le chômage ne fait que croître, le cac 40 rythme nos télévisions.



Je devrais me satisfaire que ce matin ils ont dit que les grands du Cac ont doublé leurs bénéfices.?



Maintenant : une définition du fascisme : mettre les pouvoirs entre les mains d’un parti unique, conquérir les pays, (impérialisme), bref ce parti est celui du fric, auxquels tous les pouvoirs sont affiliés. Lobbies, basses manœuvres, ambitions personnelles.



La difficulté moderne est que ce capitalisme authentiquement fasciste aujourd’hui dans ces deux définitions, est de plus virtuel c'est-à-dire soumis aux desiderata d’une dizaine de personnes dominant le monde et auxquelles nos gouvernants doivent leurs élections



Et comme figurez vous que ce dieu le pognon, qui soumet les états eux-mêmes à des notations, est lui-même un titan aux pieds d’argile, bref, tout pourrait s’effondrer !



Alors, ces gosses des banlieues, manipulés, par la publicité et probablement quelques agitateurs, ces gosses, en échec, incultes, violents, qui ne savent rien de ce que nommons démocratie, crient un besoin de reconnaissance, dont ils ignorent même les plus simples fondements ou simplement l’existence. Vaste problème, quand on renonce à la mission régalienne de l’Etat en matière d’éducation, pour la confier aux organismes privés, mais que surtout, cet état, notre état, de démocratie et de tolérance n’a plus rien d’autre à dire qu’amen à un dieu de pognon sans racine et virtuel.



Alors Maja, nous n’avons rien inventé : les latifundistas faisaient des plans sociaux improvisés ainsi que les maîtres des forges d’Asturies. Et de Bilbao. Rien n’a changé ni ne change.



La modernité est d’être soumis à un dieu de paille le pognon, et virtuel, et se dire qu’au moins j’en profiterai le temps de ma splendeur d’imbécile même si je tue mes enfants, ou plutôt ceux des autres.