Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

jeudi 25 août 2011

Mon pays, mon pauvre pays (1)





Il y à Madagascar je crois, 18 ethnies "officielles", réparties sur le territoire. Il est clair que cet aspect revêt ici une importance toute particulière. La misère, l'analphabétisme et surtout l'absence de moyens de communication font que ces « poches » ethniques vivent en vase clos et souvent dans la détestation des autres. Si on ajoute à cela le culte des ancêtres et le caractère sacré de la terre, (qui est celle des ancêtres), on a repliement sur soi, une perméabilité à une religiosité sectaire particulièrement active, et la culture des « fady » c'est à dire des interdits.



Je peux vous assurer qu'à Madagascar, au moins dans les coins que  nous avons fréquentés, c'est à dire le plus souvent sur une route, parfois, sur une piste « facile », je précise bien, car c'est loin d'être le cas partout, avec en plus les aléas climatiques, vous pouvez vous arrêter dans n'importe quel coin supposé  désert, par exemple pour faire une photo ou satisfaire un légitime besoin naturel, et vous verrez en moins de 2 minutes surgir des enfants rieurs et des adultes pas toujours aimables, selon les régions, sans avoir perçu la moindre trace de hutte ou de village. Comme jaillis des termitières, des fourrés maigres ou des troncs de baobab, toujours selon les régions évidemment.



Mamy explique que le seul coin qui ne soit pas « fady » c'est le bord de la route, car ailleurs, on peut tomber sur des arbres sacrés, ceints de tissus, des pierres debout des tombeaux insoupçonnables et bien d'autres choses imprévisibles qu'un « vazaha » non averti comme moi, ou même s'il est averti mais ne possédant pas toutes les variantes subtiles de « fady » , selon les ethnies, pourrait bien profaner.



Attention où on marche, même parfois comment on marche, car il est des lieux où il faut marcher à reculons, ne jamais montrer quelque chose et à fortiori un tombeau, planté en rase campagne, encore moins une autre personne, d'un index tendu, et bien d'autres choses encore. Il faut le replier, l'index en question.



Donc pour, éviter des emmerdements inutiles, si on peut dire, prière d'uriner entre deux portières, pour les dames, ou contre une roue, pour les messieurs, au bord de la route. Je censure volontairement et pudiquement, le cas particulièrement douloureux et humiliant de la « turista », inévitable si on fréquente les redoutables « hotely », sans prendre les précautions élémentaires d'éviter l'eau ordinaire et de s'en tenir à du « poulet gasy », typiquement malgache, haut sur pattes, maigre comme une hampe de pique et savoureux, se nourrissant par ses propres moyens, au bord des routes de préférence lui aussi, rôti façon immolation par le feu, avec un plat de riz cuit et recuit. Tout autre variante culinaire est à proscrire pour cause d'insuffisance d'anticorps adaptés ou de sucs digestifs suffisamment corrosifs et longuement conditionnés par la pratique et ses attaques, pour affronter avec succès ces dures épreuves. Simple recommandation pour les vaillants randonneurs qui souhaiteraient goûter à toutes les spécialités locales, au hasard des « gargotes », autre nom des « hotely », perdues dans la nature.



Et il y en a, de ces spécialités, et vraiment à des prix défiant toute concurrence ! Ne pas lésiner sur la pharmacie, jusqu'à l'antibiotique large spectre, en plus de l'anti palu incontournable et des inévitables répulsifs pour moustiques, dont Mamy, qui se foutait de nous, raffole maintenant, pour usage professionnel !



En tous cas, des spectateurs attentifs peuvent très probablement être là. Si ces contingences sont satisfaites au bord de la route, ça ne froisse, normalement, nullement les ancêtres, et ça amuse plutôt les autres. Les malgaches sont eux mêmes de formidables pisseurs, en tous lieux, pourvu que ce soit au bord d'une route, ou contre un mur, ou à l'air libre, aussi bien à la ville qu'à la campagne. C'est Mamy qui nous l'a fait remarquer. Ça le fait rire, mais plus tristement qu'on pourrait le penser.





Les routes restent rares et convergent sur Tana. On relia d'abord Tamatave, à l'Est, nous verrons plus tard pourquoi. Puis Tulear , au sud ouest, et Manakar au Sud Est peu ou prou en empruntant la même route jusqu'à Fianarantsoa, par une route splendide pour Tulear,sublime pour Fianar Manakar, puis Majunga au Nord Ouest, puis Diego au Nord, peut être bientôt Fort Dauphin au Sud, par la cote Est et sans bacs.



Ces axes importantissimes sont larges comme des « petites » départementales françaises, empruntés par les voitures éventuellement, plutôt rares, des camions surchargés essoufflés et dégueulant souvent l'huile brûlée dans les montées, et surtout, surtout, les taxis brousse, surchargés de passagers et de fret surréaliste. Ces doux messieurs sont les rois de l'asphalte, roulent à fond, et dans le mépris le plus total d'un code de la route hérité, il est vrai, des français.



Le trafic est plutôt faible, mais le revêtement de ces routes nouvelles se défonce en ornières traîtresses, parfois sur des kilomètres, parfois aussi, s'éboulent. Sans être un expert en confection de route, il me semble qu'on a économisé au maximum sur les matières, aussi bien en remblaiement, qu'en empierrement et qualité d'asphalte. Les ponts rares, lorsqu'ils existent, sont souvent percés, et les lames métalliques rugissent sous les pneus. Pas rassurant parfois !



Mamy refuse comme beaucoup de chauffeurs de rouler la nuit, car les attaques sont assez fréquentes. Les cibles privilégiées sont les voitures de « vazaha » non résidents, dans ce cas les voleurs peuvent être de mèche avec les chauffeurs eux mêmes, toujours d'après Mamy, les camions isolés pour leurs cargaison, mais surtout les taxis brousse. C'est une des raisons pour lesquelles les chauffeurs vont à tombeau ouvert et se donnent aussi du courage au rhum malgache. Très rock and roll les chauffeurs.



La route est jonchée de ces véhicules en souffrance, mais on se débrouille toujours pour réparer les essieux, les freins, les embrayages, les moteurs ou les transmissions. Les passagers attendent stoïquement au bord de la route. Les taxi brousse qui acceptent de rouler la nuit se regroupent en sortie de la ville de départ et forment un convoi qui roulera à fond, pour « évidemment » éviter les mauvaises rencontres, qui, en général commencent par une grosse pierre ou un tronc d'arbre en travers de la route déserte. Donc, première règle, éviter de se trouver en rase campagne, la nuit tombée, et encore moins sur les pistes. Normalement les chauffeurs connaissent des « étapes » sures. Pendant ces deux dernières années, car Madagascar se trouve pratiquement sans gouvernement digne de ce nom, ce type d'insécurité qui a toujours existé, a fortement augmenté, et ne fait plus, comme avant, rigoler.



Ces malheureux camions et taxis brousse sont les victimes d'un autre racket en forte expansion : les contrôles de police. Les voitures individuelles, ou les rutilants 4X4 semblent moins exposés, à ce danger là, car on peut tomber sur des dignitaires du régime. En ce moment c'est tout à fait systématique. Mamy raconte qu'entre Tana et Tulear, il y a 23 contrôles de police, et tout le monde sait pratiquement à coup sûr où ils se trouvent. Alors les chauffeurs partent avec 23 feuilles de journaux pliées sur un billet . L'importance du billet, assez modeste toutefois, dépend du niveau d'infraction, car tous sont en infraction, que ce soit pour les contrôles techniques , l'état du véhicule, la surcharge, le fret ou le défaut d'assurance. Mamy appelle cela la « politesse » ! Les policiers ou militaires mettent ainsi du beurre dans les feuilles de manioc. De Tana à Majunga nous en avons subi une dizaine qui furent de simples formalités, juste marquer l'arrêt, annoncer qu'il y a à bord des « vazaha » qui travaillent ici, accompagnés de malgaches et circulez ! Par contre, camions et taxi brousse passaient tous à la casserole.



Sur la courte route entre Majunga et l’hôtel, après un dîner, donc assez tard, car un délai de 2 heures pour être servis est plutôt raisonnable dans un restaurant malgache autre qu'un « hotely », nous avons été arrêtés par un militaire hilare, armé d'une mitraillette en bandoulière, et qui, visiblement n'avait plus soif. Il a demandé la « politesse » et Mamy, sans se démonter lui a dit que ce n'était pas bien de faire ça, car nous étions des « vazaha » très importants. « Ah bon » il a dit, toujours hilare, « passez alors » !



« Mon pays, mon pauvre pays ! » a dit Mamy. Je crois bien qu'il avait les larmes aux yeux..



à suivre


Le Deck is back!

Grande nouvelle, le deck est de retour avec son tauromaquis. http://tauromaquis.over-blog.com/

Pour les amoureux de belle écriture et d'aficion, à déguster sans modération.

Content de te revoir l'ami!

vendredi 19 août 2011

Marxisme et communisme en Espagne de 1936

Les arguments développés jusque dans les années 1960 bien avancées par le régime franquiste pour justifier l'insurrection des généraux débutée le 17 juillet 1936 étaient au nombre de trois. Nous citons ici in extenso Herbert r. Southworth dans « Le Mythe de la Croisade de Franco », édition française du Ruedo Iberico de 1964, l'édition espagnole du même ouvrage par le même éditeur datant de 1963.

« 

    • les élections de 1936 étaient entachées de fraude et le Gouvernement qu'elles avaient amené au pouvoir était illégal ,
    • la terreur rouge dont le point culminant était le meurtre de Calvo Sotelo, provoqua les généraux ainsi que le peuple et précipita la guerre civile,
    • Franco ne fit que se soulever en temps voulu pour prévenir l'exécution d'un plan communiste soigneusement élaboré pour se saisir du Gouvernement. »



L'immense historien reprenait ici les écrits de l'historien pro franquiste Lunn, en vue d'une analyse critique. En fait ces trois points assez essentiels, doivent être intégrés dans une réflexion plus globale et complexe, si on se donne la peine de vouloir quitter les sentiers battus et rebattus du manichéisme autour du « marxisme » et du « communisme » en Espagne.



De ce point de vue, il est intéressant de constater comment l'Histoire a évolué sur ces trois sujets.



Aujourd'hui la thèse de l'illégalité du gouvernement de front populaire de 1936 est totalement abandonnée, par tous les historiens, avec le paradoxe toutefois, que les seules irrégularités graves et incontestables constatées l'étaient à Orense, fief précisément de Calvo Sotelo, lequel avec un cynisme déconcertant ne s'en était pas caché. Il était totalement opposé à tout parlementarisme. Toutefois cette élection fut validée par les Cortes du Front Populaire. En tous cas cette illégalité ne fait absolument plus débat. Ce qui par contre est vrai, est que le système électoral favorisait les grandes coalitions et les différences en nombre de sièges avaient peu à voir avec les avantages en nombre de voix. Mais ce même système avait favorisé les Conservateurs face aux Républicains lors de leur victoire en 1933, favorisée précisément par la division des Républicains et du PSOE, et de l'ensemble des forces dites de « izquierdas ». Mais cette division des « izquierdas » sera un problème récurrent, qui sapera les bases fragiles de la Deuxième République espagnole.



Bien que ce thème ait perduré au delà des années 60, il est historiquement insoutenable, donc, exit !



Le second point est bien plus intéressant. « La terreur rouge ». Imaginons, et quelles qu'en soient les raisons, qu'en 1936, que le peuple espagnol eut une formidable ré-espérance. Imaginons que la très nouvelle République (1931), immédiatement attaquée par les possédants, l’Église et les militaires, n'avait pas les moyens de sa politique, ruinée par la crise de 1929 et les prodigalités de la dictature « sans cruauté », il faut le signaler, de Primo de Rivera, qui avait ramené des milliers d'ouvriers sans travail dans les grandes villes, et surtout à Madrid. Et cela, la jeune République le paya terriblement, du coté des impatients, qui la harcelèrent, et du coté des possédants Église y compris qui organisaient depuis 1931 la fuite des capitaux, et des syndicalistes traditionnels qui voulaient se préserver et semblaient ne pouvoir raisonner qu'en termes quantitatifs. Elle avait déjà subi ces attaques en 1931/1932; elle avait déjoué la ridicule « Sanjurjada », Azana fumant sa cigarette au balcon. Bref, on rigolait un peu.



De plus, la République, durant le premier « biennio », de 1931 à 1933, avait subi les assauts dévastateurs des « syndicats » principalement anarchistes, représentant les « impatiences » du peuple. Ainsi ces émeutes comme celle de « Casas Viejas » , ont bien plus ébranlé la République que la « Sanjurjada », jugée du coup, cette République, par les uns comme incapable d'assurer l'ordre, et par les autres coupable de violences envers le peuple et ses légitimes revendications. En fait, la République avait lancé une très (trop?) importante série de réformes structurelles, après l'élaboration pénible d'une Constitution, « vertueuse » et certainement « imparfaite »,mais n'avait pas les moyens de ses ambitions principalement pour l'éducation, l'amélioration du sort des ouvriers et pour la réforme agraire. Il s'en suivit cette impatience et des vagues de revendications de plus en plus violentes. Enfin, la séparation de l’Église et de l’État, voulue par Azana et illustrée par l'expression fameuse, « l'Espagne n'est plus catholique », extraite d'un discours fleuve d'une très haute tenue et surexploitée a fini d'inquiéter les catholiques y compris modérés, surtout d'ailleurs les petits propriétaires terriens, qui n'avaient rien d'opulent, mais traditionnellement étaient aussi catholiques. Ils se sentaient doublement menacés par la propagande anti réforme agraire, alors qu'ils n'étaient nullement menacés, et, qui plus est, blessés dans leur pratique religieuse.

De plus, des fissures importantes commençaient à se manifester au niveau du PSOE, liées aux différends entre l'exécutif du Parti favorable à Prieto, partisan d'une alliance avec les Républicains d'Azana, dont finalement il était très proche politiquement mais aussi psychologiquement, Républicains qu'on pourrait assimiler à un centre gauche, et les dirigeants du puissant syndicat UGT tenu par le vétéran Largo Caballero. qui lui était en « compétition » avec la tout aussi puissante CNT d'aspiration anarchiste, lancée dans une stratégie de « gymnastique révolutionnaire ». Ce qui devait conduire Largo Caballero qui pourtant était résolument réformiste et l'avait prouvé en collaborant avec la dictature de Primo de Rivera à épouser, au moins au niveau des discours, une posture « révolutionnaire », afin de ne pas être débordé sur sa gauche par les anarchistes. S'éloignant des Républicains il contribua puissamment à la défaite des « izquierdas », au profit des conservateurs, plus particulièrement des « radicaux » de Lerroux et de la CEDA de Gil Robles. Cette évolution a brillamment été étudiée récemment par Helen Graham, prélude à la destruction ultérieure pure et simple du PSOE, qu'elle analyse également. Par un subterfuge on avait réussi à écarter la CEDA du pouvoir , mais en fait ce fut ni plus ni moins qu'une alliance entre Lerroux et Gil Robles, qui conduisit au « démaillotage » des avancées sociales du « biennio ». Pour Largo Caballero l'introduction de ministres de la CEDA au gouvernement était tout simplement un « casus belli ».



La déception d'une part des incessants blocages des « Cortes » durant le « biennio », d'autre part, la perte du pouvoir au profit des conservateurs, fit qu'on dériva peu à peu dans une surenchère verbale, et des provocations des deux cotés qui conduisirent à la « grève révolutionnaire » de 1934, dans laquelle le PSOE eut sa part de responsabilité. Ceci dit, on peut penser qu'au delà des mots, Largo Caballero, le futur « Lénin » espagnol, était tout sauf un révolutionnaire, et en matière de révolution, on en était resté à une vision plutôt romantique ou abstraite, sur le modèle des convulsions du XIXème siècle, de « pronunciamento » en « pronunciamento ». Cette grève échoua totalement et surtout à Madrid, fief de Largo Caballero mais également à Barcelone. Seules les Asturies tinrent bon, avec ses mineurs experts en explosifs et mieux organisés. Ce fut Franco qui la mata avec ses troupes marocaines, « regulares » et « Tercio », aidé par le, par la suite, tristement célèbre Dorval. On estime à près de 2000 les morts chez les mineurs et de 15 000 à 20 000 incarcérations pour Tomas, 40 000 pour Tunon de Larra, sans qu'on comprenne bien si dans un cas il s'agit d'uniquement le Nord de l'Espagne, dans le second de la totalité. Incarcérations, souvent accompagnées de tortures.

.
Prieto, compromis dans une histoire fumeuse de fourniture d'armes aux mineurs, alla prendre l'air à Paris, Azana qui était totalement étranger à la chose fut embastillé dans le navire prison de Barcelone et Largo Caballero, lors de son procès dira qu'il n'avait participé en rien à l'affaire. En fait, un peu de la même façon que sa collaboration avec la dictature de Primo de Rivera lui avait permis de « sauver » la UGT de la mise hors la loi, il chercha à tout prix à la préserver de la vindicte des conservateurs. On pense que c'est au cours de son emprisonnement qu'il découvrit Marx et Lénine.



Largo Caballero, ancien ouvrier stucateur reste une énigme. Il existe peu de biographies approfondies mais il reste présent partout. Né en 1869, il avait en 1931 donc 62 ans et était un vétéran du PSOE qu'il rejoignit en 1894 et surtout du syndicalisme via la UGT. C'était semble t'il un syndicaliste habile, un homme d'appareil rompu aux manœuvres à l'intérieur du syndicat, mais un politique assez limité voire désastreux, en tous cas bien loin des habiletés de Prieto, lui même autodidacte mais brillantissime journaliste et politique, encore plus éloigné de l'intellectuel Azana, voire de Besteiro, ou encore Barrio ou Negrin eux aussi, brillants intellectuels et souvent politiques, et tant d'autres. Son seul soucis était l'hégémonie syndicale de la UGT, menacée sur sa gauche et au niveau « révolutionnaire » par la remuante CNT. Il est tout à fait certain qu'il fut très influencé par Araquistain, qui nourrit mes lectures matinales, sous les grands filaos du Mozambique. J'en reparlerai à propos précisément du « marxisme » espagnol.

à suivre

vendredi 12 août 2011

Pour la route!

Voici sa lettre dans son rapport d'activité:

La lettre du Père Pedro

Chers amis, chers bienfaiteurs !

Nous avons vécu une année 2010 très difficile ! Nous avons été témoin de l’incapacité des politiciens à remettre le pays sur les rails de la paix, de la justice et du développement ! Leurs principales préoccupations ont été la chasse aux postes, aux privilèges et aux salaires ! Le bien de la Nation est resté leur dernier souci ! Cela, avec l’indifférence et l’aval implicite de La communauté internationale ! Quel scandale, quelle impuissance, quelle colère et quelle amertume pour le Peuple Malagasy de se voir coupé de toutes les aides internationales sans raison apparente !

Le commun des mortels des citoyens malagasy ne sait plus à quel Saint se vouer !

Nous avons assisté depuis le début de la crise à l’éclatement de la société malagasy !

Il n’y aura plus jamais l’unité que nous avons connue et vue de nos propres yeux, dans les années tout de suite après l’indépendance. Cette époque où les citoyens avaient une confiance aveugle en leurs dirigeants, les croyant patriotes et sincères et où ils avaient voté unanimement pour le seul candidat de la liste ! Mais ils ont déçu et démontré le contraire ! Ils ont emmené leur pays et leurs citoyens dans un tunnel sans issue ! Combien d’orgueil et d’arrogance de la part de ces illuminés, pour eux-mêmes et leurs familles ! Cette farce et ce théâtre sont dénoncés en plein jour par de nombreux médias du pays ! L’hypocrisie également ! Le président de La Transition, Andry Rajoelina, attaque cette mentalité qui a appauvri la population toute entière ! Lui même a dénoncé qu’il n’y avait pas eu de vraie volonté politique pour changer les choses depuis l’indépendance !

La pauvreté a augmenté encore cette année un peu plus ! La majeure partie de la population qui se trouve en brousse vit au jour le jour et se trouve sans avenir, elle s’habitue malheureusement à la souffrance et à la fatalité !

Nous assistons encore également à une dégringolade du respect du bien commun et même de la nature, par les incessants feux de forêts et les coupes illicites de Bois de Rose et de tant d’autres espèces. Chacun fait ce qu’il veut et sans aucun respect envers la Communauté humaine dont il fait partie !

Les gens pensent de moins en moins que ce qu’ils font peut nuire à ses compatriotes ! C’est chacun pour soi et Dieu pour tous !

Depuis 40 ans que je suis dans ce beau pays, avec cette flore et cette faune exceptionnelle, cette population si accueillante et si pacifique, jamais je n’aurai pensé qu’il devienne violent et hostile à ce point là, surtout dans les grandes agglomérations et les villes ! La misère extrême a frappé et percuté profondément les valeurs ancestrales malagasy et nombreux sont ceux qui sont atteints par cette catastrophe ! Les dirigeants, par égoïsme, indifférence et insouciance, se sont fait complices de cette chute dans l’abîme de la pauvreté !

Tout un Peuple est devenu un laboratoire d’expériences pour les politiciens sans scrupules qui souhaitent s’ériger au rang des héros nationaux à la mode, comme antan, dans la Corée du Nord !

La conséquence de ces expériences infructueuses est que le pays tombe en lambeaux ! Nous avons plus de 100 partis politiques, avec chacun des membres qui arrivent à réunir des supporters se disant eux-mêmes membres du parti, alors qu’en fait, ils ne sont que des curieux ou des gens payés pour venir en nombre et crier des slogans au nom de leur chef !

Un néophyte à Madagascar pourrait croire à ces manifestations en disant qu’elles sont imposantes, convaincantes, mais en fait il n’y a que de la fumée !

Nombreux sont les journalistes étrangers qui croient comprendre cette situation complexe à Madagascar, et pourtant c’est le contraire, ils tombent dans les préjugés tout faits qu’on leur a tendus !

Les journalistes étrangers croient tout savoir sur ce pays et pourtant ici tout est différent de ce qu’ils ont vécu, les cultures de chaque pays étant uniques ! Concernant les journalistes nationaux, il y a une lueur d’espoir puisqu’ils commencent à dénoncer les exactions et les injustices que subit le peuple. Ils osent plus s’exposer pour dire en plein jour toutes les alliances de partis politiques qui sont contre nature et qui se font sur le dos du peuple !
4

Nous vivons dans le monde de l’apparence et du « oui » ! C’est rare que quelqu’un vous dise « non » !

Les touristes croient venir dans un pays de cocagne où tout est beau et où la joie règne, mais ce n’est qu’une façade. Les malagasy ont souvent le sourire, mais c’est une manière pour eux de se protéger et de créer une défense face à l’inconnu qui arrive parfois avec prétention.

En venant ici, des touristes nous ont rapporté qu’ils n’avaient pas imaginé une telle pauvreté dans ce pays. Personne ne les avait avertis.

Un peuple si gentil et si visiblement heureux, pourquoi reste t’il si pauvre ? Et pourquoi la pauvreté augmente t’elle d’année en année ? Y a t’il une raison ? Aucune pauvreté ne tombe du ciel, elle est provoquée et voulue par une catégorie de politiciens et par ceux qui détiennent le pouvoir financier et qui se sont accaparés le pouvoir et l’argent pour se servir scandaleusement eux-mêmes !

Ceux qui ont demandé à être élus ont cherché les honneurs, l’argent et le pouvoir ! Le bien être de leur Peuple, le progrès, l’aménagement de la vie publique et du territoire n’étaient pas dans leurs préoccupations, sinon comment expliquer que Madagascar soit dans le peloton des pays les plus pauvres de la Terre avec une population si intelligente et si travailleuse, surtout dans les campagnes ?

Il y a 40 ans, L’Inde, Taiwan, La Corée du Sud étaient dans la même situation que Madagascar, mais aujourd’hui ces pays se sont relevés, ce qui prouve bien que rien n’est impossible quand il y a une vraie volonté politique, économique et sociale.

C’est une réalité ! Rarement un dirigeant a osé dire la vérité à son peuple. On préfère lui caresser le dos, le traiter en enfant, pour mieux l’asservir. Ce sont par la vérité, par la création d’emplois qui est une priorité absolue, par l’école, par la santé, par la discipline et la solidarité, qui étaient si fortes autrefois, que l’on avancera ensemble !

Un peuple qui a faim et dont la jeunesse est vouée au chômage, est imprévisible et peut éclater à tout moment. Les exemples ne sont pas loin, nous les avons à côté au Mozambique, Niger, Tunisie, Algérie.

Le laisser aller ne fait que grandir d’année en année ! Personne n’ose parler haut et fort et interdire le désordre qui s’installe partout comme si c’était la voie normale à suivre !

Plus la réaction tardera à venir, plus le désordre, le sauve qui peut et l’anarchie prendront de la place, et plus ce sera difficile d’y remédier plus tard !

Ce qui est difficile à comprendre c’est qu’à tout moment, de faux leaders peuvent surgir en faisant croire qu’ils ont la solution aux problèmes de Madagascar ! Même des personnes qui ont été longtemps absentes de leur pays et qui vivent aujourd’hui dans un milieu très aisé et loin des problèmes des 80% de malagasy qui vivent au dessous du seuil de pauvreté, pensent être les « sauveurs » de leur Peuple !

Ce qui est encore plus surprenant, c’est que ces faux leaders ont des groupes de gens qui les suivent dans des mouvements qui se désintègrent dans le néant ! Néanmoins, ils peuvent rester présents dans les médias internationaux, avides de scoop.

Les villes sont devenues des lieux de refuge pour des milliers de paysans qui cherchaient un emploi et une solution à leur pauvreté ! En fait, ils n‘ont fait qu’aggraver la situation précaire de la ville qui n’avait aucune infrastructure pour les recevoir !

Ainsi ont surgit des bidonvilles remplis de gens déçus, exclus et vaincus moralement. Cela a engendré les vols pour survivre, l’alcool pour se réfugier dans l’illusion et ensuite sont venus, la drogue, la prostitution, le crime et la débauche ! Il n’y a plus d’interdit, tout est possible, tout peut être fait sans être empêché par un quelconque service d’ordre !

Une grande partie des citoyens sont exaspérés de voir le déni des autorités compétentes de la capitale et des forces de l’ordre, qui laissent les enfants et les adultes s’installer dans la rue sans aucune entrave. Comment est-ce possible que des responsables de la capitale ne pensent pas trouver des gestes dissuasifs et combattre ce fléau qui détruit la dignité humaine ? C’est eux, qui finalement poussent les jeunes à se noyer dans l’alcool et la drogue, car ils n’ont plus d’espoir de voir leur vie s’améliorer.

Il est clair que si on laisse des milliers de familles dans les Taudis au bord notamment des chemins de fer de la ville, les enfants de ces familles deviendront obligatoirement des malfaiteurs. Il n’y a aucune raison, ni prétexte pour exonérer les politiciens d’avoir fait du tort à leur peuple et à leur jeunesse. Il est temps que ces personnes demandent pardon !

Dans ce monde de la globalisation, toutes les injustices se savent ! Si elles ne sont pas contestées dans leur pays, elles le seront ailleurs, car les frontières n’existent plus. La justice doit être la même pour tous !
5

Antananarivo, la Capitale, est aujourd’hui étranglée et saturée ! On perd un temps fou pour faire seulement quelques kilomètres à cause des embouteillages qui sont là à chaque heure ! Combien de gaspillage en gas-oil ou en essence !

Comment est-il possible que depuis 50 ans les responsables de la ville n’aient pas prévu et pensé construire de nouvelles routes pour désengorger le trafic urbain, chaque année plus important, et aussi des trottoirs pour les piétons ! Ils ont les statistiques en main avec le nombre de nouvelles voitures qui entrent dans le pays chaque année, pourquoi n’ont-ils pas prévu de créer de nouveaux axes ou de routes pour ces milliers de véhicules ! Les conducteurs commencent à perdre patience et à devenir agressifs au volant.

Cela est difficile de comprendre comment ces dirigeants ont pu être si aveugles et si insouciants de l’avenir de leur ville et de leur capitale ! On ne sait plus qui sera capable de mettre un peu d’ordre à Antananarivo, soit pour fluidifier la circulation, soit pour trouver des solutions aux commerçants qui occupent les trottoirs et même les rues les plus utilisées, en construisant des nouveaux marchés !

La ville est asphyxiée aux yeux de tout le monde, même aux yeux de la Communauté Internationale, ainsi que d’experts, en tout genre, bien rémunérés !

Incroyable mais vrai ! Voila où nous en sommes aujourd’hui ! Pour travailler dans une telle ambiance, il faut une foi d’acier et une patiente à toute épreuve ! Il faut donner l’envie et être tout le temps avec les gens pour leur expliquer les raisons de cette catastrophe, qui n’était pas inévitable s’il y avait eu un minimum de patriotisme et de bon sens ! Il faut aussi expliquer aux enfants, en primaire, au Collège, au Lycée et même à l’Université, que le progrès, la propreté, la discipline, le respect du bien commun, et la direction des affaires d’état sont possibles !

Il faut donner l’exemple et faire ce que l’on dit !

Les gens ne suivent que les exemples concrets ! Basta les belles promesses, les belles paroles, les beaux discours, c’est le moment de l’action et du travail concret ! Basta les bons souhaits, il faut construire immédiatement de milliers de nouveaux logements, de nouvelles routes, arrêter de préparer des dossiers pendant des années, il faut aller plus vite ! Les gens sont fatigués d’attendre ! Les pauvres savent bien qui les respecte, qui les aime et qui les aide vraiment ! Ils ont un don spécial pour capter les ondes positives des personnes qui les approchent et les aiment vraiment ! Quand vous faites ce que vous dites et que vous êtes un homme vrai, les pauvres vous suivent et ils sont prêts à faire des efforts ! La confiance est la base de tout travail et de tout succès ! Mais cela est une lutte de tous les jours ! Un combat sans fin !

Il faut penser impérativement inclure les 80% de citoyens défavorisés dans tous les plans de développement qui vont se faire dans l’avenir.

Le Référendum du 17 novembre 2010 a démontré la soif du Peuple malagasy d’aller aux urnes et de résoudre la crise politique par les élections ! Plus de 53 % des citoyens sont allés voter ! La Communauté Internationale est resté muette !

Pourtant le 28 novembre 2010, des élections présidentielles ont eu lieu en Côte d’Ivoire et la Communauté Internationale a fortement réagit, ne voulant pas reconnaître leur échec ! En Egypte, le dimanche 5 décembre, ont eu lieu les élections parlementaires, et seulement 27% des électeurs sont allés voter ! Aucune réaction et rien à ajouter de la part de la Communauté Internationale ! Comprend qui peut ou qui veut ! Qui ou quel diplomate a cité les termes « inclusif » et « consensuel » pour résoudre la crise politique malgache ? Dans n’importe quelle démocratie, il n’existera jamais d’unanimité pour un parti ayant accédé au pouvoir, mais celui qui a le plus de vote dirigera le gouvernement, c’est le cas pour Madagascar comme pour tous les autres pays du monde.

Pour le cas de Madagascar, nous voulons bien croire que le Patriotisme, et surtout de la jeune génération de politiciens, finira par triompher, mais il faudra encore faire beaucoup d’efforts.

Nous ne pouvons pas passer non plus sous silence toutes les tracasseries administratives auxquelles nous sommes confrontés et tout spécialement pour régulariser nos terrains, c’est toujours le parcours du combattant, un vrai calvaire. On ne comprend pas comment un fonctionnaire puisse faire venir un ouvrier ou un paysan des dizaines de fois, venant de loin, pour régler un dossier, sachant que l’on perd souvent toute une journée pour le déplacement en centre ville !

Nous espérons que les nouvelles autorités, qui sortiront des urnes en 2011, prendront conscience de tous ces problèmes de pauvreté et feront tout leur possible pour mettre plus de justice, plus de vitesse et plus de simplicité pour régler les dossiers et plus de bon sens dans le fonctionnement de tous les lieux
6

administratifs et créer des emplois pour relancer le développement ! C’est tout un peuple qui trouvera ainsi un nouveau souffle, une nouvelle confiance dans ces autorités, et une nouvelle joie de vivre.

Pas étonnant, face à l’apathie des dirigeants, que nous n’ayons pas pu améliorer notre quotidien et avancer vers plus de solidarité et d’égalité ! L’abîme entre les riches et les pauvres ne cesse de se creuser davantage ! Jusqu’à quand ? Avant que ce ne soit trop tard, ensemble, réagissons tout de suite !

Les riches qui se retranchent derrière leurs murs et leurs barbelés feraient mieux d’investir dans les emplois que dans la protection de leurs biens.

A l’Association Akamasoa, avec des milliers de jeunes et de personnes, nous faisons quotidiennement des efforts pour ne pas sombrer dans le pessimisme et dans l’indifférence ! Preuve que rien n’est impossible quand il y a la foi, la détermination et l’Amour !

Nous lançons un cri au secours des populations, car ainsi est la situation dans laquelle nous vivons. Nous avons voulu sans complaisance, ni agression, témoigner de la réalité que nous côtoyons tous les jours au milieu de la vie des gens les plus modestes, qui ont aussi un droit sacré à une vie meilleure appuyée par toutes les lois et conventions internationales. Si j’ose dire tout cela, c’est par amour pour ce grand peuple malagasy qui a encore dans ses entrailles la force de resurgir et de faire revivre les valeurs de ses ancêtres que sont le partage, la solidarité, le fihavanana, socle et fondement de leur existence qui m’ont séduit dès mon arrivée dans cette belle île.

Voici notre rapport d’activité et ce que nous avons réalisé courant 2010 !

Père Pedro OPEKA

mercredi 10 août 2011

un dimanche matin sur la colline du Père Pedro 2

Voilà, en fait au sol, une fois le gymnase plein, cela faisait une croix, avec des allées devant, derrière et sur les cotés. Cela ne devait rien au hasard.










Il y avait des invités : un père slovène comme le Père Pedro, un autre dont on apprendra qu'il s'occupait d'une léproserie, l'autre qui récupérait les « aliénés » dira t'on. On imagine mal ce que cela peut être ici. Je les ai vus en conciliabule dans le « presbytère ».







La musique était en place depuis un moment. ( me cago! la photo est encore de Mathilde). Curieux assemblage de percussions, de cordes, de cuivres, un violon et un accordéon. Tous des hommes ici. Mon épouse, Mathilde et Mamy avaient pris place sur un banc, au pied de l'estrade. Surplombant l'orchestre un groupe de femmes de rouge vêtues, quelques enfants aussi, dont une toute petite fille vêtue d'une fausse peau de je ne sais quoi. La musique a démarré puis les chants des femmes en rouge. Parmi elles, une voix, puissante, un peu gutturale comme ces chants du Pacifique, ou comme chantent aussi les malgaches lorsqu'ils retournent leurs morts, magnifiquement juste aussi. J'en ai eu les larmes aux yeux et la chair de poule, car je ne voyais pas dans le groupe qui chantait aussi, seulement, sa voix, comme un cri harmonieux quoique strident, qui m'avait envahi.



Je m'étais installé dans le tendido Sud, pour prendre de la hauteur, au milieu d'une foule assise qui, sans un regard, s'était écartée sur mon passage. Vous le dirai je aussi, saisi par une odeur jusqu'alors inconnue, ou juste pressentie dans certains quartiers que nous avions traversés : âcre et forte. Pas de sueur non plus, comme une odeur d'un vieux sac de jute ampli de paille rance. Je n'ai pas de mot, en fait. Depuis je tourne cette phrase dans ma tête, de peur de la dire et qu'elle soit mal interprétée, mais oui, voilà, la misère a une odeur qu'on ne peut pas confondre avec le Numèro 5, même aspergé sur du pas net. Elle s'est gravée dans ma mémoire. Devant moi, une femme donne le sein à son bébé.



L 'orchestre avait pris une belle assurance, le son s'était arrondi, tout en conservant une disharmonie particulière mais toujours musicale, et cette voix, que les autres voix ne parvenaient pas à couvrir ! Je m'attendais à quelque chose de très « Gospel », en fait c'était de Madagascar, du Pacifique et de la colline d'ici, « AKAMASOA » , « les bons amis ». Sûrement très malgache, comme une âme ensevelie et opprimée qu'on libérerait pour un moment, un instant de grâce, avec une gaîté naïve et grave, comme au bord des larmes. Ils sont entrés en procession par la grande entrée Est du gymnase . Le Père fermait la marche, souriant aux enfants qui venaient à lui. Dans cette odeur de musc et ce son d'un autre monde, j'ai pensé au Madiran que nous allions chercher avec mon père chez un vieux monsieur, sur les hauts de Maubourguet, il y a si longtemps, lorsque le Madiran était le Madiran, rugueux, terriblement tannique, âpre et brûlait avant de libérer ses arômes de terre, de roches, de galets du gave, de cèpes, de violette et de feuilles mortes, ses vieux ceps tordus hors d'âge, mais historiques, et ses barriques qui, lorsque la bonde était ôtée soufflaient des nuages rugissants de senteurs violentes, comme une lampe magique. Allez savoir pourquoi ! (pardon Bernard Largocampo pour cette digression œnologique iconoclaste et incompétente).



Je ne conterai pas le détail de la liturgie à laquelle je n'entends rien. J'ai le souvenir de chants et de danses constants et la présence écrasante du Père Pedro. Un vrai « show man ». Je sais qu'il a parlé longuement en malgache. D'une voix de galets roulés par le gave. Je n'ai vraiment rien compris, mais les trois ou quatre mille assistants alternaient gravité et rires d'enfants en joyeuses cascades. Toujours, il va au contact, un peu comme s'il en éprouvait un besoin impérieux. Puis à un moment il promené le Livre dans tout le stade, en musique évidement. J'ai pensé à Charlton Heston dans les Dix Commandements ». Le Père Pedro est grand, massif, avec des épaules de déménageur et des mains de travailleur de force. Mamy m'a dit qu'il parlait un malgache quasi parfait, avec une infime pointe d'accent. Habituellement, ça le fait marrer les vasaha qui parlent le malgache. Il paraît que c'est plutôt difficile.



Puis toujours en musique et, lui chantant avec la foule, le Père Pedro est parti une nouvelle fois dans le stade cueillir des enfants, des vieilles, des femmes et une petite albinos. Ils se tenaient tous par la main, la petite albinos juste derrière lui. Et il a à nouveau parlé en français. Je compris alors pourquoi les vazaha étaient recensés à l'entrée. Il parle un excellent français, un excellent espagnol car il a commencé son œuvre en Argentine et m'a t'on dit un très bon anglais et allemand, plus certainement quelques langues de l'EST. Il a dit que Dieu, aimait les pauvres et les démunis, les enfants, les femmes dans la misère, les veuves et les vieilles. Il nous a dit qu'il savait que nous les étrangers du Nord, nous avions aussi nos problèmes mais qu'il y en avait aussi à Madagascar . Il a dit que la seule mission de la politique et des politiques devrait uniquement être de penser à cette misère et de la soulager. Il a dit que les politiques devaient abandonner leur vanité, leur suffisance, leurs compromissions avec les pouvoirs d'argent, et qu'ici, à Madagascar, il aimerait les voir en dehors des périodes électorales. Puis il a remercié le Prince Albert de Monaco qui selon lui a fait un mariage modeste et pense toujours à AKAMASOA. En effet Monaco est un des principaux donateurs, et Albert les visite souvent. Il lui a souhaité tout le bonheur du monde et a invité la foule à prier pour lui et sa femme. En toute franchise, même si j'avais su, je ne pense pas que je l'aurais fait. En revanche il a avoiné la cour d'Angleterre et ses fastes et son absence de générosité. Bon ! Il a aussi parlé de la petite albinos, affirmant qu'il n'osait pas dire ici le sort qui aurait pu lui être réservé. J'ai ma petite idée depuis que Mamy m'a confirmé qu'effectivement, pour le jumeaux par exemple, dans certaines contrées du Sud, on les plaçait à la sortie d'un enclos à zébus qu'on lâchait, et que s'il en restait un en vie, on le gardait. Jamais les deux. Ah, les interdits et les « fady » de Madagascar !




Ils ont fait aussi la quête, et je compris pourquoi une armée de bâtons prolongés par un filet en forme de nasse étaient stockés au bord de l'estrade. On m'en a évidemment mis un devant le nez. Je n'avais pas d'argent sur moi. Nous le laissons au coffre de l’hôtel avec les passeports et les billets d'avion. C'est mon épouse qui en avait sur elle, pour payer le gas oil si besoin et le restaurant. J'ai eu très honte, me demandant ce que les assistants pouvaient donner. Toujours en musique et danse qui accompagna la sortie des religieux, par où ils étaient entrés. La musique et les chants ne voulaient pas cesser. Au bas de l'estrade, une vieille s'est mise à danser, suivie par une jeune femme bien ivre, et quelques autres.



Nous nous sommes retrouvés en bas, sonnés et abasourdis, avec le souvenir de moments d'émotion intense qui nous avaient emmenés au bord des larmes.





A suivre

PS: je tiens à remercier ce virtuose de Marc Delon d'avoir sauvé les photos de la petite albinos et de la femme à l'enfant. J'ai des petites videos de Mathilde mais je ne sais toujours pas comment les intégrer! Me cago!

vendredi 5 août 2011

Un dimanche matin sur la colline du Père Pedro (1)

Nous étions arrivés un vendredi, après une nuit dans l'avion. Nous avions tenté Air Austral, départ le jeudi de Bordeaux via Toulouse et la Réunion pour arriver le vendredi vers midi à Tana. Nous avons été sensibles aux attentions du personnel de bord et à un voyage bien plus confortable qu'avec Air France, une présence constante des hôtesses et stewards, des repas nombreux et corrects, et nullement la sensation d'être transportés comme du bétail, le tout à un tarif plus qu'avantageux par rapport à notre ex-fleuron national qui abuse vraiment de sa situation de monopole.



Passage au contrôle de police, un charmant jeune homme « uniformisé » nous demande un « billet ». Vlan 5000 arriary, soit à peu près 2 euros. Il était content. J'en reparlerai.



Mamy et L nous attendent. Le même rire, la même joie réciproque, plus contenue chez l'austère L, pourtant au bord des larmes. Mamy a changé de 4X4, c'est maintenant un gros Hyundai. En tous cas, celui là marche et n'a que 200 000 kilomètres. Une affaire en or qu'il nous explique en détails. Je n'y comprends rien. La logique malgache et plus singulièrement encore celle de Mamy fait d'infinis méandres, se perd, a des résurgences inattendues. Bref, il se comprend, et me semble t'il, l'aurait pratiquement troqué contre deux épaves, mais sous toutes réserves, je ne suis pas certain d'avoir tout saisi.



Le dimanche, nous nous sommes levés tôt, en direction, vers 7h30, de la colline du Père Pedro, pour l'Office. Une promesse que nous nous étions faite. La route est raide et pavée pour atteindre le haut du village. Ils cheminent en groupes, de ce pas lent et compté des malgaches, pauvres parmi les pauvres, ici , comme sans but ou plus exactement une manière d'indifférence qui émeut. Ils montent vers le stade, fantômes sans rire, certains endimanchés. Nous ne serons pas en retard, mais ici, encore, c'est un mot qui n'a pas grand sens. Le gros 4X4 avale doucement et facilement la pente. Mamy économise toujours sa mécanique.



Ici le Pere Pedro accueille les plus pauvres des pauvres, il les sort des poubelles, de la rue ou d'on ne sait où, tant ce pourrait être inimaginable pour nous, les accueille avec leur violence, souvent leur alcoolisme, des misérables, des vieilles, des femmes seules chargées d'enfants, des hommes en rupture de société, des veuves, des orphelins. Il règne ainsi à Madagascar sur près de 70 000 personnes, auxquelles il essaie de redonner un but, qu'il loge, en particulier, ici à Tana, dans les jolies maisons de cette ville nette et policée. Il leur donne un travail, leur donne à manger, scolarise les enfants et n'est pas peu fier des bons résultats au bac et de ces universitaires avocats, gestionnaires, professeurs, instituteurs, médecins, dentistes issus aussi du village, qui sont revenus ici, comme pour s'acquitter d'une dette et aider au pilotage de ce lourd navire, qui doit soigner, nourrir, éduquer, produire, vendre, gérer et surtout trouver des fonds, pour accueillir à la porte le maximum de miséreux et au moins réconforter ceux qu'on ne peut pas accueillir. Nous avions déjà constaté le respect peut être aussi, la crainte qu'inspirait à ses sujets cet homme de granit au regard d'enfant. Les politiques le redoutent aussi pour la « puissance » électorale qu'il pourrait représenter et les mots terribles de ses jugements sans appel. On imagine aussi la rigueur qu'il faut imposer lorsque l'alcoolisme, le vol, la violence, le viol, l'absence absolue de repères sont toujours présents ou menaçants, pour redonner à ces miséreux parmi les plus miséreux, une dignité d'être humain.




L'office se tient dans un grand gymnase attenant au terrain de football. Mamy a garé le 4X4 sur le parking « visiteurs » les autres viennent à pieds et peuvent parcourir des kilomètres. Aussitôt un jeune homme plutôt distingué est venu noter notre nombre, notre pays d'origine. Donc, un malgache, deux « vazahas français » pure laine, et leur fille une malgacho-  « vazaha », comme l'appelle L, de bientôt 13 ans. C'est noté.




Dans le gymnase qui se remplit peu à peu, un autel sur une estrade. Les gens prennent place au sol sur des nattes, des enfants et des femmes, vêtus de vêtements de différentes couleurs et dans un assortiment précis. Dans les gradins, on s'installe sans hâte. Aucune cohue ni cri, juste une tranquille pulsation de la foule, comme un cœur qui bat. Des « assistants » sévères, silencieux, précis et fermes sillonnent les rangs du bas pour installer les enfants dans un ordre mystérieux et rigoureux. Ça ne bronche pas. Aucune hâte, mais un ballet bien réglé et silencieux, un peu froid pour qui connaît la propension à la légèreté rieuse, c'est un euphémisme, ou plutôt, bordélique, des malgaches.




Je déambule, appareil en mains. Pas du tout l’impression d'un hall de gare. Quelque chose de contenu. Sur un coin de la grande estrade, l'homme de granit confesse des jeunes filles. D'ailleurs le mâle est plutôt rare ici. Mamy me dira qu'il est occupé à des œuvres beaucoup plus prosaïques, comme se saouler. Elles s'agenouillent, il leur pose la main sur la tête puis les écoute. Ce n'est pas long, je me souviens alors qu'enfant lors de la préparation à la première communion, je devais inventer des vols de sucre ou des détournements de la pièce destinée à la quête pour quelques sucreries dans l'épicerie voisine de l'église et ouverte à cette heure. Le confesseur sentait horriblement mauvais de la bouche, ça oui je m'en souviens. C'était m'a t'on dit un ancien aumônier militaire, peut être bien de la Légion, mais je n'en suis pas sûr, pas commode, mais cela ne justifiait pas son haleine de fennec. Il me filait un paquet de dix Ave je crois, ou autres choses. Il m'est arrivé de bâcler les prières rédemptrices, mais après tout, je n'étais pas certain d'être coupable, au moins de ce dont je ne me sentais pas coupable. Où il est, le Père Pedro, lui, ne peut pas sentir leur bouche, ni elles d'ailleurs, la sienne. Il reçoit leur parole, lui simplement assis sur une chaise, elles agenouillées une à une à coté, il les écoute, puis leur parle. Elles se relèvent tête basse, puis une autre arrive, toujours tête basse. Je me souviens alors que Mamy m'avait dit, déjà en 2007 que Mathilde était une européenne parce qu'elle se tenait droite et faisait face. Un peu plus tard, le Père me dira de ne pas gêner l'Office avec mes photos et en restant dans les allées. Il m'avait repéré. Je me suis senti honteux comme un enfant.



Je suis étonné de cette confession en plein stade, qui se remplit toujours. Je vais sur les tendidos ouest, derrière l'autel. Le jour levant met une tache d'or au fond du stade.





(à suivre)

mercredi 3 août 2011

"La gorge était serrée, les yeux embrumés mais le cœur grand ouvert"

Je découvre le magnifique texte, que cette « magnifica persona » Maja Lola a produit alors que j'étais à Madagascar, et concernant « la valise mexicaine : http://photosmotstoros.blogspot.com/search?updated-max=2011-07-12T22%3A06%3A00%2B02%3A00&max-results=7.



Nul doute que j'aurais réagi, de la même façon, abandonnant pour un temps mon carnet de voyage et certains textes pour mon « Saints et Maudits ».



C'est faussement « en creux » qu'elle évoque le « devoir de mémoire », avec cette retenue, cette clairvoyance et cette sensibilité si particulière et aiguë de cette fervente catholique, « paisana de Miguel Hernandez ».



La première réflexion que je ferai, est que, entre personnes de bonne volonté, et surtout qui cherchent à comprendre, en s'en donnant les moyens, même si bien des choses les séparent que ce soit politiquement ou religieusement, une communion de pensée est possible sur un sujet aussi sensible et complexe que la Guerre d'Espagne, les presque 40 ans de « franquisme », la démocratie en général et plus particulièrement en Espagne, mais aussi le caractère « universel » de ce conflit terrible.



En tous cas, je vois dans ce beau texte, une justification à ma quête obsessionnelle, et la confirmation, que tout cela va largement au delà d'un anti franquisme et d'un pro communisme caricaturaux et manichéens. Et aussi que cette boucherie fratricide reste d'une actualité brûlante. Donc, tenter de la comprendre, permet à mon sens, soit d'en redouter d'autres du même tonneau, soit de les analyser.



Certes on a fait mieux ensuite, aussi bien quantitativement que qualitativement, si on peut dire, mais ce conflit portait en germes tous ceux qui se sont succédés depuis, et conserve un caractère de « modernité » ahurissant. Ce qui permet, cette très relative « modestie quantitative » par exemple aux vertueux « historiens révisionnistes » d'instiller l'idée par exemple, que Guernica, aussi bien que Durango, avant, furent de bien petites choses, oubliant au passage tout le caractère « novateur » et symbolique de ces événements. Ce n'est pas le lieu ni le moment d'en parler ici..



L'autre caractère « novateur » de la Guerre d’Espagne, est qu'elle fut aussi une guerre d'images et de propagande. Ainsi par exemple la photo ignoble des abrutis analphabètes, prétendument anarchistes, dansant avec des squelettes de nonnes a fait énormément pour mobiliser les lobbys catholiques. Différence de traitement, par exemple l'ignoble tuerie de Badajoz, qui, avec des images cachées et des journalistes insultés tels que Jay Allen ou le portugais Alvez, a pu être occultée par le franquisme et niée très longtemps.



Alors bien sûr, le lendemain du 18 juillet 1936 où les généraux se soulevèrent fut suivi d'un déchaînement de violences réciproques. Bien sûr, c'est dans le mois ou les deux mois qui suivirent que la plupart des 7000 religieux fut assassinée. Cela reste ignoble même si on, peut alléguer que la République, déjà victime de ses divisions internes, de ses erreurs, n'avait aucun moyen de faire respecter, malgré ses efforts, il faut le reconnaître, un ordre quelconque. Il fallut attendre début 1937 pour pratiquement en finir avec les meurtres systématiques de religieux et aussi les terribles « checas » qui devaient être relayées plus tard par la SIM.



Ceci étant dit les sujets d'étonnement sont multiples. Franco enferma ensuite son peuple dans le mensonge, la répression la plus féroce, profitant de la Guerre Mondiale, puis dès le début de la Guerre Froide de son anticommunisme.



Il faudra bien parler du marxisme en Espagne et de son « communisme ». Ce n'est pas le moment, ici. Il faut seulement remarquer que l'organe franquiste, la Causa, se fit un « devoir » de recenser les morts pour arriver, grosso modo, hors les champs de bataille, à ce score ahurissant de 50 000 partout. Il est vrai qu'avec la funeste loi des « Responsabilidades » qui permettrait jusqu'à la fin de la vie de Franco de poursuivre les espagnols qui avaient soit été ou présumés tels, sympathisants de la République, soit étaient censés avoir été communistes, dans ce pays quadrillé par la phalange et les curés délateurs, dénonçant ceux qui n'allaient pas à la messe, qui allait réclamer un proche mort, s'il n'était pas franquiste ? Certains anonymes déposaient parfois des bouquets contre les murs des cimetières ou à Viznar.



Ainsi nul doute que les victimes « franquistes » ont été recensées avec soin, même, on le sait maintenant, avec exagération. Quant aux victimes du franquisme, de la répression, des camps, sans compter bien sûr les émigrés, ni les 300 000 enfants du franquisme, arrachés à leurs mères dans les camps et offerts en adoption à des familles bien pensantes, le chiffre le plus crédible serait de 200 000.



Encore une fois, on a certainement fait bien mieux depuis, mais il aura fallu attendre pratiquement l'an 2000 pour que les archives s'ouvrent, aussi bien en Espagne qu'en Russie et ailleurs. Ceci explique que l'Histoire dont parle Maja a fait des progrès considérables et permis, enfin, à toute une formidable génération d'historiens espagnols, enfin ! de rétablir une partie de la vérité. Et je l'avais déjà signalé, sans la moindre complaisance, par exemple lorsqu'ils analysent l'attitude du clergé et détaillent avec minutie aussi la façon dont il fut exterminé, par exemple, Casanovas pour l'Eglise, ou Gibson pour ce qui concerne Paracuellos.



Ainsi la République a fait son mea culpa, et s'auto flagelle, on attend toujours que la génération antagoniste des révisionnistes fasse de même.



Bien sûr Maja, l'Histoire progresse, et on peut aussi réfléchir sur son sens. Mais comment ne pas « comprendre » que des familles cherchent à reconstituer leur passé. De la même façon je sais que tous les franquistes n'étaient pas fascistes, pas plus que tous les républicains n'étaient staliniens, mais peut t'on baser une « réconciliation » sur le mensonge, la dissimulation et la manipulation. On ne peut « pardonner » que ce qu'on connaît, et améliorer cette connaissance est aussi le rôle de l'historien et de l'Histoire. Je comprends également que lors de la transition qui en grande partie fut conduite par d'ex franquistes, il fallait calmer les tensions, mais « amnistier »? C'est bien tout ce qui fait la complexité « du devoir de mémoire », qui pour sa gravité et les souffrances auxquelles il s'adresse mérite autre chose que les jugements sommaires qu'on nous inflige.



Sur le sujet de l 'émigration, tu défends la même thèse qu' Araquistain, à savoir que plutôt que de financer une contestation qui reproduisit, parfois de façon grotesque, tous les conflits internes des « izquierdas », elle aurait pu financer avec cet argent les émigrés restés sur le sol français, et adoucir leur sort. Je voudrais dire aussi, rejoignant Don Ernesto, qu'on ne peut pas soupçonner de francophilie, dans les deux sens du terme, que recevoir en quelques jours plus de 400 000 malheureux en errance, cela pose quelques problèmes logistiques et aussi de « rejet » d'une partie de la population. Encore ne furent t'ils pas refoulés et renvoyés vers une mort certaine. Alors que Vichy livra des politiques espagnols et les envoya vers la mort.



Nombre de ces émigrés ont aussi décidé de continuer la lutte contre le nazisme et combattants aguerris se sont illustrés dans de nombreux réseaux de la Résistance, à tel point que les divisions espagnoles furent les premières à entrer dans Paris libéré.



Quant au Mexique, bien évidement, il essaya d'aider, et ce dès le début, la République assaillie, mais avec des moyens plus que réduits et avec des armes légères d'une efficacité nulle et souvent dépareillées. Pendant ce temps, dès le début Aout, Hitler et Mussonini avaient envoyé leurs avions, puis leurs hommes, Mussolini massivement. Ceci permit de transporter les troupes marocaines et la légion ( le Tercio) qui fit ce terrible travail durant le mois d'Aout de « nettoyage » de l'Andalousie, jusqu'à Badaloz.



Les armes russes n'arrivèrent avec les Brigades Internationales que fin Octobre à Madrid qui fut miraculeusement sauvée. Première et seule « victoire » de la République. Pourtant nombreux sont ceux qui pensent que la messe était dite, sous couvert de l'ignoble pacte de non intervention.



Mais probablement, le point le plus important, et porteur d'enseignements actuels, comme pour la Libye, la Syrie, l'Egypte, peut être la Tunisie et le Maroc, la démocratie ne se décrète pas, encore moins de l'extérieur. Ce fut probablement l'erreur de Azana et de la seconde République espagnole que de croire, qu'à partir d'une revendication du peuple, parfaitement justifiée, on pouvait ex abrupto appliquer une démocratie. Azana a pensé qu'il suffisait de séparer l'Eglise de l'Etat, de construire des écoles, d'essayer de faire la réforme agraire, de réformer l'armée, bref du jour au lendemain, il a cru qu'on pouvait installer une démocratie, dans une société qui n'y était pas préparée.



Ce qui l'a abattu, outre les blocages conservateurs, religieux,militaires et des possédants, est que les syndicats, surtout la CNT jugèrent que rien n'allait assez vite . Or, dans tout pays démocratique, elle a été le fruit, la démocratie, de durs conflits, de révolutions et d'années d'éducation, avec un état qui assurait ses fonctions régaliennes.



En Espagne, il a fallu près de 40 ans de franquisme. Azana, auquel Negrin avait proposé de l'emmener au Mexique, est resté en France, pourchassé par les sbires de la Gestapo. Il est mort et est enterré à Montauban. Il aimait la démocratie, et pas la guerre.