Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

jeudi 18 août 2016

Trop de pique tue la pique et les toros

Bien sûr à l'opposé de certains, je ne sais pas tout des mystères de la corrida, bien sûr je respire mal la vraie ambiance des vrais aficionados, ceux qui gueulent et font le raouhhhhhhhhhh ! , dont ils ne connaissent même pas l'origine, à la sortie des toros y compris lorsqu'ils sont somptueux, bien sûr la corrida est un spectacle, bien sûr !

Pedraza de Yeltes avait envoyé une corrida majuscule pour le 14 Août à Dax. Une corrida à faire pleurer la Monumental de Madrid lorsqu'elle était digne de ce nom, à faire pleurer ma Condesa, et à distiller 10 gin tonics avec mon hermanito Angel ! Une corrida pour toreros et matadores, un luxe terrible de nos jours, ignorée d'ailleurs par les penseurs des « blogs taurins », si friands des merdes de Prieto et autres saletés. Sans parler des merveilles portugaises, je ne parle pas des huîtres !

Une corrida à pleurer, une corrida comme seul cet élevage sait en produire, et compte tenu de l'attitude indécente des pseudos « aficionados » « toristas » et puristes (je rigole) , ne tardera pas à abandonner ce mode de sélection pour ne plus voir massacrer ses toros, ces bijoux de bravoure, mais aussi de fond, de noblesse et de caste.

Le seul critère, la grande mode, au nom d'une « corrida » de verdad est de faire partir ces toros de l'autre bout de la piste sur le cheval. Et comme ces toros ont une vraie passion pour les chevaux, il y arrivent à pleine vitesse. On imagine la densité du chocs entre le cheval, fût t 'il de Bonijols et sa technologie de caparaçon et ces toros pesant entre 560 et 620kgs. Jusque là me direz vous, même un manso peut arriver de loin sur un cheval.

Ces toros prenaient le fer avec une immense bravoure, poussant de tous leurs reins, longuement, longuement longuement. Et le public en demandait toujours plus, deux fois, trois fois, quatre fois depuis la rocher de Gibraltar.

Ainsi le superbe quatrième, le second de Rafaelillo se vit infliger 4 de ces piques, et littéralement se tua sous le fer. C'est à dire qu'au sortir de la dernière pique qu'il prit avec la même générosité suicidaire, le brave se coucha, se releva, se recoucha, et par égards envers cette bravoure on hésita un peu à le relever en le tirant par la queue. On lui donna la puntilla.

J'ai pu avoir le privilège de dialoguer avec le matador, « à chaud ». Pour lui, deux piques suffisaient. Il a laissé faire la troisième et tenta d'arrêter la quatrième sous les protestations du public. « C'est que, dit t'il tristement, il faut faire plaisir à l'aficion ! »

On doit me reconnaître que ce n'est pas la première fois que je proteste contre cette première pique donnée de très loin. C'est un geste pour moi, anti taurin, qui peut bousiller les toros. Il faudrait donner la première pique de près, sans tuer le toro, mais en testant sa bravoure, puis lui donner peu à peu du champ.

L'éleveur fabrique ces toros uniques de bravoure au cheval, importants, mobiles malgré la ration de fer qu'ils prennent ou les efforts incroyables sous le cheval, souvent toréables malgré cela. Rafaelillo fut bien avec son premier mastodonte, on sait ce qu'il advint de son second. Adame n'a pas réédité sa performance de l'an dernier, jamais en place, « pegapase », vulgaire à pleurer. Del Alamo hérita du troisième, un « cabron », compliqué comme on dit et qui de plus allait « a mas », débordant le matador, totalement épuisé en fin de faena et au bord du malaise. Bon peut être qu'il manquait une pique à ce diable.

L'épisode du quatrième avait singulièrement refroidi l'assistance qui ne fit que peu attention aux deux derniers toros.

A l'évidence l'éleveur présent à la corrida avec son responsable Jose Ignacio Sanchez avait mis beaucoup d'espoir dans ce lot superbe. Leur déception était palpable, leur incompréhension aussi.
Un voisin me dit que les piques lui suffisaient. Il sait pourtant la dureté du châtiment imposé à ces toros, jusqu'à ce que sous l'effort ils empoisonnent leurs muscles.

Il me paraît important de raison garder, comme en toutes choses, et éviter de massacrer ces merveilles de bravoure et de caste, pour que finalement, Zocato trouve qu'ils manquent de « toréabilité ». Et j'ose à peine préciser qu'il existe une Présidence. Je sais que si elle avait osé limiter certaines piques, elle aurait été immolée sur l'autel de la « vraie tauromachie »

Trop de pique tue la pique et les toros.



vendredi 1 avril 2016

Enhorabuena Titi!


Bernard Dussarrat, dit « Titi », et fils de « Titi », est un dacquois de souche, quoique espagnol par sa mère. Mais, c’est une alliance qui porte beau, non seulement, parce qu’une heure suffit pour rallier « l’Espagne », n’entrons pas dans les conflits basco ethno de l’Euskadi, au moins pour faire le plein de cigarettes de mon épouse, car je ne fume toujours pas depuis quatre ans et 3 mois. Appelons cela l’Espagne car parfois on y parle Espagnol, quoiqu’à contre cœur, et Bilbao, cœur de la "basquitude" a longtemps été une référence en matière de corrida dure.

Maintenant, à mon grand désespoir, on a instauré le rouge et  blanc obligatoire pour toutes les fêtes, y compris de la région, ce qui fait le bonheur de certains commerçants et de lignes de fabrications chinoises ou autres. Car, voyez vous, ceci est censé « gommer » les différences sociales, mais surtout, est venu d’une imitation aussi stupide que niaise des fêtes de Pamplona, oubliant au passage que ces couleurs sont celles de la Navarre fasciste des  «  requetes » carlistes. Quant à l’élimination des différences sociales, disons que les penas plus ou moins privées se multiplient, qu’on peut se démolir selon l’endroit au champagne ou au rosé « low cost ». Je parle du prix d’achat, pas du prix de vente du litre.

Titi, est un indestructible des tendidos. Il s’est souvent distingué, en chemise très colorée, interpelant de sa voix de stentor embrumée les éleveurs, les toreros, les organisateurs, les curés éventuellement, les ignares nombreux dans les étagères. Il renouait avec cette tradition de la corrida populaire, ce que pour sa survie, elle n’aurait jamais dû cesser d’être. Je me souviens encore de mon père hilare rentrant de corrida, après que quelques tomates aient été envoyées à la face des toreros, ou commentant le geste de Dominguin pour indiquer qu’il était le « numero uno », provoquant la réaction sublime d’un illuminé polyglotte hurlant « numero cincuenta » ! C’est qu’à l’époque on avait « l’indignation » cultivée !

Pour revenir à l’objet de ce post, après une si longue absence, je voudrais parler de son livre « Dax en habit de lumières », sorti tout récemment, et présenté sous les arènes de Dax, à une assistance plutôt importante. Ce livre qu’il cosigne avec le photographe Bertrand Caritey, est illustré de photos rares et toujours dans le propos. La couverture est de l’ami Jérome Pradet, sur fond sombre, et fait de ce livre un objet qu’on a envie de regarder avant de l’ouvrir. Il a été édité par la jeune maison d’édition dacquoise Passiflore, dirigée par Florence Defos Durau et Patricia Martinez, qui fait un travail remarquable de sauvegarde d’un patrimoine dacquois et landais. En tous cas, la mise en page de ce gros pavé, de près de 300 pages est extrêmement soignée, y compris, la correction.

Pour le contenu, ce sont 25 ans de temporadas dacquoises, dans leurs plus extrêmes détails, corridas, novilladas avec ou sans picador, rejon, et aussi course landaise, qui fait tellement partie de la tradition des fêtes dacquoises.

Le polémiste acide que peut être Titi, s’efface devant la narration des faits, pour convenir qu’une commission taurine, ayant à charge l’organisation et les risques d’une temporada, est animée du désir de bien faire et de conserver aux arènes de Dax son brio, même si, en creux, on comprend bien que le sujet est hélas aussi politique, c'est-à-dire que, contraintes ou non, les commissions, à part quelques privilégiés très souples de l’échine, ont tendance à valser avec les changements politiques.

En tous cas, il réussit le tour de force de ne pas sombrer dans la collection de "resenas", c'est-à-dire que même s’il s’appuie sur des témoignages précieux, il a su conserver l’essentiel, c'est-à-dire l’essence de chaque corrida, avec une certaine distanciation, et fait mieux comprendre l’esprit de cette arène de Dax, si particulière. Je veux parler d’une certaine commisération envers les autres arènes, d’ une haute estime de soi même et d’un goût pour le beau toreo, qui l’a faite « s’auto surnommer ? »  la « Séville française »..

Son travail, finalement, dépasse largement la seule enceinte de Dax, car on y voit évoluer les phénomènes de mode, toros et toreros, et aussi assister au naufrage de certains sangs. De ce point de vue, ce livre est une somme, utile pour tout aficionado.

L’écriture est très belle, limpide, précise, toujours très soignée, même s’il n’a pas pu résister à un « l’assureuse de soustons », dans sa relation de la corrida de Cristina Sanchez .  Chaque année est précédée d’un texte introductif court mais précieux et conclue trop souvent par l’évocation d’un aficionado disparu.

Ce pourrait être une compilation ennuyeuse de textes convenus, mais il a su chaque fois éclairer chaque événement, faisant que son livre se lit d’une traite, non, je n’ai pas dit de pis, ni des blanches. En plus il se dégage une manière de sérénité, surprenante pour qui connait un peu le personnage, et surtout,  ce bonheur d’écrire qui sourd de chaque page.

Enhorabuena Titi !