Navalon de tentadeo

Navalon de tentadeo
Navalon de tentadero. Photo de Carmen Esteban avec sa permission

vendredi 1 avril 2016

Enhorabuena Titi!


Bernard Dussarrat, dit « Titi », et fils de « Titi », est un dacquois de souche, quoique espagnol par sa mère. Mais, c’est une alliance qui porte beau, non seulement, parce qu’une heure suffit pour rallier « l’Espagne », n’entrons pas dans les conflits basco ethno de l’Euskadi, au moins pour faire le plein de cigarettes de mon épouse, car je ne fume toujours pas depuis quatre ans et 3 mois. Appelons cela l’Espagne car parfois on y parle Espagnol, quoiqu’à contre cœur, et Bilbao, cœur de la "basquitude" a longtemps été une référence en matière de corrida dure.

Maintenant, à mon grand désespoir, on a instauré le rouge et  blanc obligatoire pour toutes les fêtes, y compris de la région, ce qui fait le bonheur de certains commerçants et de lignes de fabrications chinoises ou autres. Car, voyez vous, ceci est censé « gommer » les différences sociales, mais surtout, est venu d’une imitation aussi stupide que niaise des fêtes de Pamplona, oubliant au passage que ces couleurs sont celles de la Navarre fasciste des  «  requetes » carlistes. Quant à l’élimination des différences sociales, disons que les penas plus ou moins privées se multiplient, qu’on peut se démolir selon l’endroit au champagne ou au rosé « low cost ». Je parle du prix d’achat, pas du prix de vente du litre.

Titi, est un indestructible des tendidos. Il s’est souvent distingué, en chemise très colorée, interpelant de sa voix de stentor embrumée les éleveurs, les toreros, les organisateurs, les curés éventuellement, les ignares nombreux dans les étagères. Il renouait avec cette tradition de la corrida populaire, ce que pour sa survie, elle n’aurait jamais dû cesser d’être. Je me souviens encore de mon père hilare rentrant de corrida, après que quelques tomates aient été envoyées à la face des toreros, ou commentant le geste de Dominguin pour indiquer qu’il était le « numero uno », provoquant la réaction sublime d’un illuminé polyglotte hurlant « numero cincuenta » ! C’est qu’à l’époque on avait « l’indignation » cultivée !

Pour revenir à l’objet de ce post, après une si longue absence, je voudrais parler de son livre « Dax en habit de lumières », sorti tout récemment, et présenté sous les arènes de Dax, à une assistance plutôt importante. Ce livre qu’il cosigne avec le photographe Bertrand Caritey, est illustré de photos rares et toujours dans le propos. La couverture est de l’ami Jérome Pradet, sur fond sombre, et fait de ce livre un objet qu’on a envie de regarder avant de l’ouvrir. Il a été édité par la jeune maison d’édition dacquoise Passiflore, dirigée par Florence Defos Durau et Patricia Martinez, qui fait un travail remarquable de sauvegarde d’un patrimoine dacquois et landais. En tous cas, la mise en page de ce gros pavé, de près de 300 pages est extrêmement soignée, y compris, la correction.

Pour le contenu, ce sont 25 ans de temporadas dacquoises, dans leurs plus extrêmes détails, corridas, novilladas avec ou sans picador, rejon, et aussi course landaise, qui fait tellement partie de la tradition des fêtes dacquoises.

Le polémiste acide que peut être Titi, s’efface devant la narration des faits, pour convenir qu’une commission taurine, ayant à charge l’organisation et les risques d’une temporada, est animée du désir de bien faire et de conserver aux arènes de Dax son brio, même si, en creux, on comprend bien que le sujet est hélas aussi politique, c'est-à-dire que, contraintes ou non, les commissions, à part quelques privilégiés très souples de l’échine, ont tendance à valser avec les changements politiques.

En tous cas, il réussit le tour de force de ne pas sombrer dans la collection de "resenas", c'est-à-dire que même s’il s’appuie sur des témoignages précieux, il a su conserver l’essentiel, c'est-à-dire l’essence de chaque corrida, avec une certaine distanciation, et fait mieux comprendre l’esprit de cette arène de Dax, si particulière. Je veux parler d’une certaine commisération envers les autres arènes, d’ une haute estime de soi même et d’un goût pour le beau toreo, qui l’a faite « s’auto surnommer ? »  la « Séville française »..

Son travail, finalement, dépasse largement la seule enceinte de Dax, car on y voit évoluer les phénomènes de mode, toros et toreros, et aussi assister au naufrage de certains sangs. De ce point de vue, ce livre est une somme, utile pour tout aficionado.

L’écriture est très belle, limpide, précise, toujours très soignée, même s’il n’a pas pu résister à un « l’assureuse de soustons », dans sa relation de la corrida de Cristina Sanchez .  Chaque année est précédée d’un texte introductif court mais précieux et conclue trop souvent par l’évocation d’un aficionado disparu.

Ce pourrait être une compilation ennuyeuse de textes convenus, mais il a su chaque fois éclairer chaque événement, faisant que son livre se lit d’une traite, non, je n’ai pas dit de pis, ni des blanches. En plus il se dégage une manière de sérénité, surprenante pour qui connait un peu le personnage, et surtout,  ce bonheur d’écrire qui sourd de chaque page.

Enhorabuena Titi !